-
Séjour Jura, été 2023. 3. Château-Chalon.
Second village du Jura labellisé "Plus Beaux Villages de France" avec Baume-les-Messieurs (à 12 km), autant Baume est hypertouristique et surfréquenté, autant Château-Chalon (environ 140 habitants) reste préservé, même en plein été. La petite cité s'est construite autour de son château et d'une abbaye bénédictine... dont il ne reste pour l'un et l'autre pas grand chose -un donjon en ruines et un pan de mur écroulé en surplomb de la vallée de la Seille. Plusieurs belvédères aménagés aux 4 coins du village permettent de profiter de cette position défensive, en nid d'aigle, avec de beaux points de vue sur les reculées environnantes et les coteaux couverts de vignes. Encépagées en savagnin, elles produisent un vin jaune réputé. Le centre-bourg conserve de nombreuses maisons vigneronnes. Grises, basses, flanquées d'un perron, elles se caractérisent par une ouverture en plein-cintre permettant de descendre directement de la rue à la cave.
A voir aussi dans le village, l'église Saint-Pierre. Couverte d'un toit en lave, elle fait corps avec le mur d'enceinte de l'ancien quartier abbatial auquel on accède par un passage voûté surmonté d'une bretèche. De l'autre côté se trouve l'ancienne école de garçons, transformée en musée. Dans une salle de classe reconstituée, avec mobilier et matériel d'époque, chacun peut prendre place derrière un pupitre et se mettre en situation d'élève à la communale.
En cet été 2023, Château-Chalon mettait à l'honneur Bernard Clavel. Franc-Comtois attaché à sa terre natale, l'écrivain, prix Goncourt pour "Les Fruits de l'hiver", tombé sous le charme de ce rustique village jurassien, y avait acheté une maison dans laquelle il vécut durant les années 1970. L'occasion de lui rendre hommage pour le centenaire de sa naissance.
Arrivée à Château-Chalon. Exposition à ciel ouvert à travers les rues du village pour célébrer les 100 ans de la naissance de Bernard Clavel. Natif de Lons-le-Saunier, l'écrivain vécut à Château-Chalon de 1970 à 1975.
Posé à flanc de falaise, Château-Chalon est un joli village aux rustiques maisons de pierre. Calme même en plein été, il est très agréable de s'y promener à la découverte de son histoire religieuse et vigneronne.
Belvédère du Petit Cour, oratoire Sainte-Anne. Bâti au-dessus de la plaine viticole mais tourné vers le village, c'est de ce petit oratoire que partait autrefois la procession de la Saint-Vernier. Créée en 1994, la Confrérie Saint-Vernier de Château-Chalon perpétue cette tradition de procession. Après avoir porté la statue en bois de leur saint patron à travers les rues du village, les membres de la confrérie, vêtus de longues chasubles jaune d'or et vertes (couleurs du vignoble) font étape chez un vigneron qui fait don de 3 clavelins destinés au trésor de la confrérie (ainsi, chaque année, 3 clavelins s'ajoutent à ceux des années précédentes pour constituer ledit "trésor", des bouteilles conservées pendant un siècle pour être transmises aux générations futures). Puis d'un belvédère, l'évêque bénit les vignes. La manifestation se termine par une messe, suivie d'un vin d'honneur offert aux villageois sur la place de l'église.
Belvédère du Petit Cour.
Panorama depuis le belvédère du Petit Cour, quadrillage de vignes sur la plaine (3 photos suivantes). Château-Chalon appartient à l'aire géographique de production du vin jaune. Une aire géographique réduite -50 hectares- également répartie sur les communes de Domblans, Nevy-sur-Seille et Ménétru-le-Vignoble, regroupant 4 appellations : Château-Chalon, Arbois vin jaune, Vin jaune de l'Étoile et Côtes-du-Jura vin jaune. AOC depuis 1936, c'est un vin sec à la robe ambrée, réputé pour ses arômes fumés.
Élaboré exclusivement à partir du cépage savagnin, le vin jaune vieillit en fûts de chêne pendant au minimum 6 ans et 3 mois. Au cours de ce processus, une partie du vin s'évapore, sans que soit rajouté du vin pour compenser la part qui s'évapore -la fameuse part des anges. Un voile de levures se forme sur le dessus, qui va protéger le vin de l'oxydation et lui conférer ses qualités organoleptiques, ses arômes complexes de notes épicées : curry, safran, gingembre, miel et noix. Perso, je suis pas fan.
Au terme des 6 ans et 3 mois de vieillissement, réalisé sans ouillage (c'est-à-dire sans combler la part des anges), le vin jaune, est mis en bouteille, soit pour 2023 une mise sur le marché du millésime vendangé 7 ans plus tôt, en 2016. Vin de garde, il peut être conservé en cave durant plusieurs décennies. Le vin jaune se vend exclusivement en contenance de 62 cl, dans une bouteille spécifique baptisée clavelin. Pourquoi 62 cl alors que la contenance classique est de 75 cl ? La différence correspond à... la part envolée des anges. Une façon de compenser les pertes de fabrication. Malin !!
Balade à travers les rues du village (7 photos suivantes). Maisons basses, harmonie du bâti aux couleurs gris et ocre du terroir.
Exemple de maison vigneronne, avec descente de cave directement sur la rue.
Dicton du cru sur le linteau. Dit comme ça... Allez, tchin !!
Rue de la Roche, une maison que l'on ne peut manquer de remarquer.
En poursuivant plus avant rue de la Roche, valises déposées au sol. Je remercie Alain David, artiste plasticien local et président de la Maison de la Haute-Seille qui, me voyant prendre des photos, est venu spontanément à ma rencontre pour échanger et m'expliquer le pourquoi de ces valises. Cette installation, réalisée dans le cadre du centenaire de la naissance de Bernard Clavel, rappelle le goût de l'écrivain pour les voyages, son itinérance à travers le monde, lui qui a déménagé une quarantaine de fois au cours de sa vie.
6 photos suivantes, la plume de l'écrivain et le pinceau du peintre : quelques uns des 14 panneaux du parcours découverte consacré à Bernard Clavel. Visibles sur les murs des maisons du village, ils présentent des phrases tirées de son œuvre littéraire (romans, contes et légendes, essais, poèmes...), illustrées de ses propres peintures.
Église paroissiale Saint-Pierre (MH en 1972). Située sur une placette, de l'autre côté du mur d'enceinte de l'abbaye bénédictine dont les bâtiments ont été presque entièrement détruits, elle abrite le trésor des Abbesses. De style roman, largement remaniée d'éléments gothiques, l'église Saint-Pierre présente un clocher à baies jumelées doté d'une tourelle d'angle. Elle est entièrement couverte en lave. Mais rien à voir avec le volcanisme, le mot désigne en Bourgogne-Franche-Comté la pierre calcaire employée comme matériau de couverture.
Clocher de l'église Saint-Pierre et sa tourelle d'angle. A noter, le sol arrivant au ras des fenêtres latérales. Une particularité qui s'explique par le fait que la placette correspond à l'emplacement de l'ancien cimetière du village, où sont enterrées 30 générations superposées de Castel-Chalonnais. Des inhumations successives qui ont élevé le sol jusqu'à son niveau actuel. Devenu trop étroit, le cimetière a été déplacé à la sortie du village en 1865, face à la tour Charlemagne.
Intérieur de l'église Saint-Pierre. L'édifice se compose d'une nef à vaisseau central voûtée d'ogives, pas de transept. Le sol est pavé de pierres tombales de notables du village.
Exemples de vitraux des bas-côtés (seconde moitié du XIXe siècle). A gauche, Sainte Anne et Saint Joachim avec Marie, enfant (Éducation de la Vierge). A droite, l'Annonciation : l'ange désigne du doigt la colombe envoyée par Dieu à Marie.
Superposition de 2 peintures murales d'époques différentes. La plus ancienne, en dessous, daterait du XVIe siècle. Très dégradée, elle représente Sainte Barbe et la tour dans laquelle son père l'avait enfermée.
Tableau représentant le Saint Suaire (XVIIe siècle).
L'église Saint-Pierre abrite le Trésor des abbesses de Château-Chalon. Parmi les différentes pièces (statues, ostensoirs, ciboires, calices...), cette statue en bois représentant Sainte Anne apprenant à lire à Marie. Dit "Éducation de la Vierge", ce thème de l'iconographie chrétienne où l'on voit Marie apprenant à lire sous le regard attentif de sa mère a été repris par de nombreux peintres, dont un très beau Georges de La Tour.
Église Saint-Pierre, portail d'entrée en plein-cintre couvert d'un auvent. Dans un renfoncement à droite, chapelle Saint-Thiébaud (2 photos suivantes), petit oratoire édifié en 1571 en l'honneur de saint Thiébaud (XIe siècle), également connu sous le nom de Thibault de Provins, issu de la famille des Comtes de Champagne.
Grande croix en fonte devant le porche d'entrée de l'église Saint-Pierre.
Du puissant domaine abbatial constitué de l'église, d'un palais, de corps de logis pour les religieuses, de bâtiments comprenant cours, terrasses, pigeonnier, puits et écuries, il ne reste que 3 éléments dont le passage voûté, visible ci-dessous. Muni d'une bretèche, c'est par ce portail que l'on pénétrait dans le quartier abbatial. Autre vestige du quartier abbatial, le Froid Pignon, à droite sur la photo. Ancienne hostellerie des chanoinesses, le bâtiment du XVIe, remanié au XVIIe, a conservé son échauguette. Devenu la Maison de la Haute-Seille, il accueille aujourd'hui un bureau d'informations touristiques ainsi qu'un musée interactif sur le patrimoine jurassien.
Portail d'entrée du quartier abbatial, XVIe siècle. Un village, 2 églises séparées. D'un côté du portail, l'église paroissiale (Saint-Pierre) ; de l'autre, l'église abbatiale. A noter, la bretèche ("souriante") au-dessus du portail. Positionné en surplomb d'un passage, ce petit avant-corps avait une fonction défensive. Le sol, percé, permettait de tirer en cas de danger.
Côté quartier abbatial. A gauche sur la photo, le toit pointu du colombier, seul vestige du quartier abbatial avec le portail et le Froid Pignon. L'abbaye a été démantelée à la Révolution. Ses pierres furent utilisées pour construire les maisons du village. Une école laïque a été édifiée à l'emplacement de l'ancienne l'église.
Construite sur le site de l'ancienne église abbatiale, l'école du village a ouvert ses portes en 1884, sous la IIIe République. Le Président de l'époque était Jules Grévy. Pendant un peu plus d'un siècle, 26 instituteurs et institutrices se sont succédé, jusqu'en 1988, date à laquelle l'école a fermé. Pas assez d'inscrits. En 2002, les locaux sont aménagés en mini musée baptisé "l'École d'autrefois", avec reconstitution d'une salle de classe des années 1920 (10 photos suivantes). Dans un décor fleurant bon le bois, le poêle et la craie, le visiteur est invité à choisir sa place face à l'estrade. Des cahiers sont disposés sur les pupitres. Encre violette et plume Sergent-Major. Preuve par neuf, règle de trois. Un bonnet d'âne trône sur l'armoire. Sur le tableau noir figure l'énoncé d'un problème où il est question de contenance et de pourcentage. Sur un autre, la leçon de morale du jour. Les murs sont couverts de cartes géographiques et de planches anatomiques. Dans la bibliothèque se côtoient des ouvrages sur le domaine colonial français et le guide du certificat d'études... On peut se servir de tout, tout ouvrir, tout consulter. Je recommande vraiment la visite de ce petit musée (participation symbolique d'1,50 €) dans lequel tout est d'époque, authentique. Ci-dessous, photo d'une classe de l'école de Château-Chalon en 1928 avec l'instituteur et ses élèves... Prendre le temps de détailler les visages, ça vaut le coup !!
Tabliers et bérets d'écoliers accrochés aux porte-manteaux.
Tout c'que j'aime... mes cauchemars d'enfant.
Auteur prolifique, Bernard Clavel nous a laissé une centaine de livres, essentiellement des romans, mais aussi des livres pour enfants, des essais et de nombreux articles. On lui doit notamment "La Grande patience", "La Maison des autres", "Les Fruits de l'hiver", "Les Colonnes du ciel", "La Saison des loups", "Harricana", "Malataverne", "L'Angélus du soir", "L'Hiver" ainsi que la préface du "Talon de fer" de Jack London et la postface de "Maria Chapdelaine". Dans le cadre des installations proposées à l'occasion du centenaire de sa naissance, la cour de l'ancienne école communale accueille 10 plaques blanches (3 photos suivantes) évoquant chacune une histoire des contes et légendes du romancier, mise en relief par le sculpteur Jacques Thibaut.
Parmi lesquelles, "Félicien le fantôme".
Et "La Reine de la Baltique".
Poursuivant ma balade à travers les rues de Château-Chalon, rue Saint-Jean, cette maison à tourelle, parmi les plus vieilles du village.
Quelques dizaines de mètres plus loin se trouve un second belvédère, le belvédère Saint-Jean (10 photos suivantes).
C'est le belvédère "carte postale" de Château-Chalon. Vu imprenable sur les maisons du village serrées autour de l'église Saint-Pierre, les jardins en terrasses, la plaine viticole et, au loin, les reculées.
Toujours dans le cadre de l'expo célébrant le centenaire de la naissance de Bernard Clavel, cette installation baptisée "Pays sage", signée Alain Plésiat. Prenant pour point de départ le roman "L'Hiver", dans lequel figure une photo prise depuis ce belvédère, l'artiste plasticien sculpteur et photographe installé à Château-Chalon a imaginé 4 cadres disposés côte à côte sur le muret. Placés à l'endroit exact de la vue qu'ils représentent, il a créé 3 tableaux à 3 saisons différentes (printemps, automne, hiver), chacun inspiré par les couvertures de 3 romans de Clavel : "Le Cavalier du Baïkal", "La Lumière du lac" et "La Saison des loups". L'idée est intéressante, c'est plein de poésie et très bien fait.
"Le Cavalier du Baïkal", automne.
"La Saison des loups", (tome 1 des "Colonnes du ciel"), hiver
"La Lumière du lac" (tome 2 des "Colonnes du ciel"), printemps.
Le dernier cadre est vide... L'été, vécu en direct !!
Le belvédère de Rochette (6 photos suivantes) se situe dans le quartier de l'ancienne abbaye, dont on distingue les murs d'enceinte.
En ruines mais encore debout, la maison de l'abbesse fait corps avec l'éperon rocheux. La petite tourelle en saillie servait d'oratoire à la religieuse.
"Libre de Fer", œuvre signée Romain Bresson. Avant de devenir écrivain, Bernard Clavel a exercé de nombreux métiers (apprenti pâtissier à 14 ans puis vigneron, lunetier, bûcheron, manœuvre, jardinier et même lutteur de foire) qui font forgé son caractère. C'est pour rendre hommage au peintre de la condition humaine, auteur d'une œuvre prolifique marquée par le réalisme social, que Romain Bresson a imaginé cette main géante, réalisée avec des matériaux de récupération. Une autre main dans la paume lui fait écho, la main qui donne et la main qui reçoit.
Panorama sur le site viticole et les reculées depuis le belvédère de Rochette.
Village de Nevy-sur-Seille, au coeur des vignes et des reculées du Jura (en arrière-plan la reculée de Baume-les-Messieurs).
Village de Voiteur.
A la sortie du village, la tour Charlemagne (2 photos suivantes). Vestige du donjon de l'ancien château comtal érigé au XIIe siècle -et donc bien postérieure à Charlemagne, malgré ce que prétend son nom- cette tour munie d'un pont-levis était destinée à la surveillance de la route du sel qui passait en contrebas, ainsi qu'à la protection des religieuses et villageois de Château-Chalon. Partiellement détruite en 1595 lors de l'attaque du duc Charles de Gontaut-Biron (maréchal de France exécuté à la Bastille pour conspiration contre Henri IV), comme l'abbaye, la tour servira de carrière de pierre pour la construction des maisons du village. En 1921, une partie des murs encore debout s'effondre, obligeant à poser un échafaudage de soutènement. Désormais, la tour est gardienne du repos éternel des Castel-Chalonnais inhumés dans le cimetière, situé juste en face.
A proximité de la tour Charlemagne, au niveau de l'aire des camping-cars, statue de la Vierge Marie, mains ouvertes vers le ciel.
(Photos prises le 17 août 2023)
votre commentaire -
Séjour Jura, été 2023. 2. Baume-les-Messieurs, site naturel d'exception.
C'est l'un des 2 villages du Jura labellisés "Plus beaux Villages de France", distinction méritée au vu de ses nombreux atouts, à commencer par sa situation géographique exceptionnelle qui en fait une définition éloquente du mot "reculée" -terme géologique typiquement jurassien. La visite s'apparente d'ailleurs un peu à une leçon de géologie. Pour comprendre ce site monumental sculpté par l'érosion, Baume-les-Messieurs se découvre de préférence par le haut. Du belvédère de Crançot s'étend devant mes yeux un paysage à la verticalité vertigineuse, à moitié mangé par l'ombre gloutonne de 2 murs de falaises formant écrin à une vallée verdoyante. A une extrémité de la vallée, le village. A l'autre extrémité, en à-pic sous mes pieds, une grotte ferme la reculée. Noyée dans tout ce vert, je cherche du regard la cascade de Baume-les-Messieurs. Cascade pétrifiante parmi les plus belles d'Europe, réputée pour la féérie de ses drapés ruisselant de roche en roche, je rêvais de la découvrir "en vrai". C'est pour elle que j'avais mis cette destination au programme de mes vacances. La suite dira que mes espoirs ont été quelque peu douchés...
En plus du paysage admirable qui lui fait écrin, le village (environ 160 hab.), baigné par la Seille, abrite un patrimoine qui justifie lui aussi la visite, notamment l'abbaye bénédictine autour de laquelle il s'est construit, inspiratrice de celle de Cluny.
Panorama sur la reculée de Baume-les-Messieurs depuis le belvédère de Crançot. Prenant sa source dans la grotte fermant la reculée, le Dard (2 km, sous-sous-affluent du Rhône par la Seille et la Saône) a entaillé le relief en une profonde vallée. A une extrémité de la vallée, le village se trouve en arrière-plan sur la photo. La grotte est sous mes pieds. Du belvédère, la cascade n'est pas visible.
Labels "Plus Beaux Villages de France" et "Site Clunisien" pour Baume-les-Messieurs (candidature en cours au Patrimoine mondial de l'Unesco). Le clocher de l'abbaye pointe au-dessus des toits depuis la route descendant au village. Les falaises de la reculée dominent le paysage. Protecteurs ou vaguement menaçants, leurs hauts murs de calcaire s'invitent dans chaque rue, sur chaque photo.
Ensemble monastique de l'abbaye Saint-Pierre. Pierre blonde, toits couverts de tuiles brunes, petites ouvertures adaptées au froid rigoureux des hivers jurassiens. Belle homogénéité architecturale autour du clocher. Édifiée au IXe siècle, l'abbaye de Baume-les-Messieurs a connu un essor considérable dès le Xe siècle sous l'impulsion de l'abbé Bernon, inspirant la fondation de l'ordre de Cluny. C'est en 909 que le saint homme partit de Baume avec 12 autres moines bâtir l'abbaye bourguignonne qui allait réformer la règle bénédictine avant de rayonner sur tout l'Occident médiéval.
Clocher de l'église abbatiale. Le clocher est coiffé d'une flèche hexagonale aux arêtes hérissées de crosses en pierre, construite au XVIe siècle à la demande de l'abbé Guillaume de Poupet (abbé de Baume de 1524 à 1583).
Portail roman de l'église abbatiale, avec ses voussures en plein cintre. Tympan nu. Le trumeau est orné d'une statue de saint Pierre bénissant le monde de la main droite (XVe siècle). Anges musiciens dans les niches latérales.
Église abbatiale Saint-Pierre, bas-côté. Avec ses 71 m de long, c'est la plus grande église du Jura.
Bras nord du transept, Mise au tombeau (XVIe siècle, MH 1919). Œuvre très dégradée, sans doute mutilée au cours de la Révolution. Un ange tenant la croix et les clous de la Passion se tient debout en arrière du Christ. Pièce rapportée, il ne présente aucun trait stylistique en rapport avec l'œuvre d'origine. Idem pour la Vierge Marie et l'apôtre Jean, de chaque côté. Joseph d'Aritmathie, Marie-Madeleine, Nicodème... ? La plupart des personnages figurant traditionnellement sur les groupes sculptés représentant des Mises au tombeau ont disparu.
Saint Michel terrassant le dragon (statue grandeur nature, XVe siècle, classement 1902).
Retable ornant le maître-autel. La photo a été prise à travers les grilles fermant à clé l'accès au chevet. Ce chef-d'œuvre de l'art flamand du XVIe siècle a été offert par la ville de Gand à l'abbé Guillaume de Poupet. Haut de 3 m, il se compose de 25 panneaux de chêne illustrant la vie du Christ, de sa naissance à sa Passion (MH en 1902). Ne s'approche qu'en visite guidée.
Bras sud du transept, autel de Sainte Madeleine. La statue de la sainte est entourée de 2 tableaux du XVIIe siècle : à gauche, "Madeleine aux pieds du Christ chez Joseph d'Aritmathie" ; à droite, "Le Christ apparaissant à Madeleine" (MH 1906).
Représentation de Jeanne d'Arc en armure recouverte d'une tunique fleurdelysée.
La nef abrite une quarantaine de dalles funéraires gravées d'épitaphes (3 photos suivantes).
Les différents bâtiments de l'abbaye sont groupés autour de cours reliées entre elles par des passages voûtés, tel ce porche en arc brisé.
L'abbaye de Baume-les-Messieurs a perdu sa vocation religieuse à la Révolution. Dans la 3e cour, dite "cour des Chanoines", les bâtiments conventuels abritent désormais des appartements privés (4 photos suivantes).
La maison à gauche sur la photo porte une plaque indiquant que le lieu fut habité par l'écrivain Pierre Gascar, prix Goncourt en 1953 pour son recueil de nouvelles "Les Bêtes". Un environnement propice à l'inspiration.
Habitat rustique avec des maisons datant pour la plupart des XVe et XVIe siècles.
Porche de la cour des Chanoines.
Le porche de la cour des Chanoines donne accès aux rues du village, permettant d'entrer et de sortir de l'abbaye.
Balade à travers les rues du village (7 photos suivantes).
La Seille, vue du pont de l'Abbaye.
Veillé par la masse imposante de la falaise, le Vieux Pont en dos d'âne sur la Seille. Belle architecture avec son arche unique en plein cintre (XIIIe siècle, MH depuis 1929).
Vallée d'effondrement en cul-de-sac creusée par le Dard, la reculée de Baume-les-Messieurs comporte 3 points d'intérêt principaux : le village, la grotte et la cascade. Ci-dessous, entrée de la grotte. La cascade est tout près.
Voilà, j'y suis. Incrédule, je découvre le spectacle : cascade à sec !! Là où devait couler l'eau, la pierre est recouverte d'une gangue de calcaire qui fait en plein soleil une vilaine réverbération : pas d'eau, couleurs pourries, déception totale.
(Photos prises le 16 août 2023)
2 commentaires -
Séjour Jura, été 2023. 1. La Chaux-du-Dombief, Pic de l'Aigle et Belvédère des 4 Lacs.
Du Jura, je n'avais que le lointain souvenir d'un séjour aux sports d'hiver en 1998. Depuis, cela faisait longtemps que j'avais envie de retourner dans ce département connu pour la beauté de ses paysages de montagnes, de lacs et de cascades. Été 2023 donc, destination Jura. Quelques jours de vacances pour lesquels j'avais établi le programme à partir de sites incontournables vantés sur Internet. Pas forcément la meilleure idée...
1er jour : La Chaux-du-Dombief, point de départ d'excursions vers le Pic de l'Aigle et le Belvédère des 4 Lacs, les 4 lacs en question étant ceux d'Ilay, du Grand et du Petit Maclu ainsi que le lac de Narlay. Tous naturels d'origine glaciaire. La randonnée n'a rien de difficile, excepté un passage un peu raide (attention genoux fragiles) avec marches en rondins et chaîne de progression le long de la paroi. Mais la récompense est au bout... A l'arrivée au Pic de l'Aigle, la vue qui s'étale devant moi est absolument sublime !! Blotti au fond d'une vallée verdoyante, le lac d'Ilay dévoile le contraste de ses eaux bleues frangées d'un étonnant liseré vert pâle. Une couleur à tomber !! Tout en longueur, il se reconnait facilement à sa petite île couverte de sapins. Des 4 Lacs, c'est le seul visible à cet endroit. Pour découvrir les 3 autres, il faut monter encore, prendre le chemin des crêtes et poursuivre par un sentier forestier sur environ 3 km.
Les belvédères aménagés à plusieurs endroits offrent des panoramas magnifiques, le genre de paysages qui vous font tendre vers la sérénité. Sauf qu'en plein été, le site -réputé- est largement surfréquenté et du coup les chemins, bondés. Chaque belvédère devient un spot pris d'assaut. Alors la sérénité... A faire hors saison, printemps ou automne idéalement, pour ne pas avoir la frustration de découvrir ces 4 lacs superbes dans des conditions "métro aux heures de pointe".
Départ de l'excursion à La Chaux-du-Dombief, petit village d'environ 650 habitants. Son nom est tiré du patois jurassien, le terme "chaux" désignant à l'origine une clairière naturelle dans laquelle se sont établis des humains. Le Dombief est une rivière de 11 km appartenant au bassin du Rhône dont elle est un sous-sous-sous-affluent par la La Lemme, la Saine et l'Ain. Ci-dessous, le clocher de l'église Saint-Point, typiquement franc-comtois avec son toit couvert de tuiles vernissées.
Sur le parking proche de l'église, départ du sentier vers le pic de l'Aigle (2 photos suivantes).
Qui dit belvédère dit belle vue (c'est d'ailleurs l'étymologie italienne). La randonnée est courue, il y a du monde agglutiné derrière les barrières... Chacun son tour pour profiter du spectacle.
Le lac d'Ilay, vu du Pic de l'Aigle (998 m) : des eaux frangées de vert pâle et sa petite île, couverte de sapins, posée dessus.
*** Les 4 photos suivantes ont été prises du belvédère des 4 Lacs ***
Les 4 lacs sont proches géographiquement mais pour tous les apercevoir, il faut monter jusqu'au belvédère. Les vues panoramiques sont splendides, en couleurs et en contrastes. Ci-dessous, au premier plan, le Grand Maclu et ses eaux émeraude. En arrière-plan, le lac d'Ilay, avec son île bien apparente.
Chalet isolé au bord du lac du Grand Maclu. L'emplacement est paradisiaque. Au loin, le village du Frasnois sur les rives du lac d'Ilay.
Eaux laiteuses bordées d'un liseré vert pâle. Appelée "beine" en géomorphologie, cette mince bande littorale formant une plateforme immergée correspond à des zones d'accumulation de sédiments.
Bleu profond pour le lac du Petit Maclu. Il est séparé de son grand frère (en bas à gauche) par une bande de terre d'une centaine de mètres. Le lac de Narlay est le plus éloigné des 4. On le devine au loin sur la photo.
(Photos prises le 15 août 2023)
4 commentaires