32e Festival des Jardins de Chaumont-sur-Loire (2023).                                                                                      Thème : "Jardin résilient".                                                                                                                                Sélection de quelques parcelles.

1."Le Corridor végétal"                                                                                                                                                    Jardin n°2

Concept : face à la réalité du dérèglement climatique et son cortège de phénomènes caniculaires de plus en plus intenses, l'homme cherche des solutions pour se protéger, notamment au coeur des villes où l'urbanisation crée des îlots de chaleur suffocants. Les concepteurs de cette parcelle proposent leur solution, celle d'un corridor végétal, sorte de couloir en osier habillé de grimpantes xérophiles qui offrirait au citadin un abri salvateur.

Mon avis : visité par temps chaud. Ça tombait plutôt bien pour éprouver l'effet fraîcheur annoncé. Dans ce couloir de verdure en S, le visiteur se glisse comme dans un cocon protecteur contre la surchauffe ambiante, progressant pas à pas à l'abri des rayons brûlants. Les allées s'ouvrent par endroits sur des zones découvertes où des plantes surgissent, résilientes, du sol craquelé (évocation du bitume des villes). La structure à claire-voie laisse passer le soleil, avec de beaux effets traversants d'ombre et de lumière. Message écologique compréhensible, bien interprété. On est typiquement dans l'esprit jardin et esthétiquement, c'est très réussi !!

(France. Concepteurs : Ashley MARTINEZ, concepteur paysagiste, et Julie COTE, paysagiste designer). 

Entrée de la parcelle avec, au bout, le corridor végétal.

 (Photos prises le 9 juillet 2023)

Vacances en Corse, automne 2023.                                                                                                                                9. Petite rando à Caracu, hameau déserté.

Dernier jour de vacances sur l'île de Beauté. Destination Caracu, un hameau du Cap Corse déserté par ses habitants, une sorte de village fantôme. Le choix d'une destination avec quelque chose d'un peu mystérieux, un petit goût d'urbex qui m'allait bien.

Perché sur les hauteurs à 168 m d'altitude, le hameau est très isolé, sans autre accès qu'un étroit sentier caillouteux grimpant sur environ 1,5 km à travers le maquis depuis le village de Meria, dont Caracu dépend. Au niveau du grand virage en épingle à cheveux, un panneau en bois indique le départ de la randonnée, à l'endroit où s'élèvent en bordure de route des tombeaux blancs. Après plusieurs centaines de mètres en sous-bois, le sentier continue à découvert en balcon au-dessus de la Méditerranée, au milieu de la bruyère et des arbousiers. Je respire profondément, le maquis exhale ses notes chaudes de parfums épicés. Quelques trouées pour profiter de vues sublimes sur la mer et les îles de l'archipel toscan. Puis Caracu apparaît. Noyées dans la végétation qui a repris ses droits, quelques dizaines de maisons délabrées semblent encore défier le temps. Pas une seule n'a conservé son toit. Des murs éventrés, des gravats. Il n'y a pas plus à voir que ça. Presque décevant, si l'on ne reliait le lieu à son histoire.

Fin XIXe siècle, la France était le 1er producteur mondial d'antimoine, un métal proche de l'arsenic. Parmi les différents gisements du pays, ceux du Cap Corse, notamment, étaient réputés, avec les 3 sites d'extraction de Meria, Ersa et Luri. A Meria, le village a vécu de l'exploitation de l'antimoine jusqu'au début du XXe siècle, employant des centaines de mineurs locaux, mais aussi italiens et polonais. Des mineurs logés à... Caracu. L'arrêt de l'activité en 1917 a été fatal à ce hameau dortoir isolé de tout. Caracu s'est alors vidé de ses habitants, inexorablement. 

(Photos prises le 12 octobre 2023)

Vacances en Corse, automne 2023.                                                                                                                                  8. Villages de Casinca : Penta-di-Casinca et Loreto-di-Casinca.

Administrativement rattachée depuis 2017 à la Communauté de Communes de la Castagniccia-Casinca dans le nord-est de la Corse, la Casinca est une micro-région présentant une grande diversité géographique. Bordée par la mer Tyrrhénienne entre Golo et Fium'Altu s'étend la partie littorale, suivie d'une vaste plaine (zone la plus urbanisée) à laquelle succède une zone de moyenne montagne regroupant 7 villages. Du plus peuplé au moins peuplé : Penta-di-Casinca, Vescovato, Venzolasca, Sorbo-Ocagnano, Castellare-di-Casinca, Loreto-di-Casinca et Porri. La route monte en lacets de l'un à l'autre, petites villes, villages ou hameaux perchés offrant de magnifiques panoramas sur la plaine en contrebas et la mer. Pierre grise et toits de lauze, chacun son caractère. Ces villages de l'arrière-pays composent une entité au bâti traditionnel d'une évidente unité. En flânant dans les rues, on tombe de-ci de-là sur un lavoir, une fontaine, un four à pain, tout un petit patrimoine soigneusement entretenu, reflet d'un mode de vie en voie de disparition.

Penta-di-Casinca.

Perchée sur un éperon rocheux entre 360 et 400 m d'altitude, Penta-di-Casinca est une commune d'environ 3 370 habitants s'étendant sur 18 km² jusqu'au littoral tyrrhénien. Avec ses ruelles piétonnes entièrement pavées bordées de hautes maisons en pierre couvertes de lauze, ses passages voûtés, ses renfoncements, ses ruelles en escalier, la visite s'impose. Distingué "Site Pittoresque du Département de la Corse" en 1973, c'est l'unique village de l'île entièrement classé. Bâti sur un énorme rocher (bien visible à de nombreux endroits), il abrite l'église baroque San Michele (XVIIIe siècle), aussi belle à l'extérieur qu'à l'intérieur.

Place-belvédère.

Le bâti s'adapte à la configuration particulière du terrain. Où l'on comprend que le village est en grande partie piéton. Bien apparent sur les 3 photos suivantes, l'énorme bloc de schiste sur lequel s'accroche Penta-di-Casinca. 

Adoucissant "fraîcheur grand air"... superflu.

Église San Michele (13 photos suivantes) avec, ci-dessous, la façade baroque donnant sur U Carrughju. 

Loreto-di-Casinca.

Village perché dominé par le mont Sant'Angelo, Loreto-di-Casinca se situe à 630 m d'altitude, ce qui fait de lui le village le plus haut de Casinca. C'est aussi l'un des moins peuplés -environ 200 habitants, une population âgée, le déclin démographique est palpable. L'animation se concentre aux terrasses de cafés de la grand place (A Piana) ombragée de platanes centenaires au milieu de laquelle s'élève une jolie fontaine ornée de 4 têtes de Méduse. Le bâtiment communal domine l'ensemble. Accessible par un double escalier creusé d'une niche abritant le Monument aux Morts, il fait à la fois office de Mairie, d'école et de bureau de Poste.

En garant la voiture, on est surpris par cette place étonnamment vaste pour un si petit village. Elle a en fait été conçue pour accueillir les pèlerins qui jadis venaient par milliers à Loreto-di-Casinca célébrer la fête de la Nativité de la Vierge Marie.

Curiosité : un impressionnant piton de schiste dressé verticalement (15 m de haut) en bordure de village, face à la plaine.  

Sur A Piazza, le bâtiment communal : Monuments aux Morts, Mairie, école et bureau de Poste.

Platanes centenaires sur la place du village. Au centre, la fontaine avec ses mascarons à tête de gorgone. 

Mitoyenneté... Le village abrite plusieurs maisons de famille dotées de belles portes ouvragées avec impostes en fer forgé sur lesquelles figure la date de construction. 

Gros plan sur A Tozza, le piton de schiste dressé au-dessus de la plaine. 

 (Photos prises le 11 octobre 2023)

Vacances en Corse, automne 2023.                                                                                                                                7. Villages de Costa Verde : Taglio-Isolaccio, Talasani et Cervione.

Située à une quarantaine de km de Bastia, la Costa Verde est une communauté de 23 communes formant une micro-région (environ 185 km²) à peu près circonscrite entre le Fium'Alto au nord, la Castagniccia à l'ouest et l'Alesani au sud. A l'est, c'est la mer Tyrrhénienne. Costa Verde... aussi verte que bleue : sur les 23 communes, 9 possèdent une façade maritime, soit 22 km de plages de Taglio-Isolaccio à San Giuliano ; les 14 autres sont des villages de l'arrière-pays accrochés à la montagne. Dans cette région rurale à faible densité de population, seuls Cervione et San Nicolao frôlent les 2000 habitants. La route grimpe de hameaux en villages. Le temps, patient, s'étire, rythmé par les cloches des campaniles autour desquels se serrent de robustes maisons de pierre. 

Du nord au sud, déambulation dans les rues de Taglio-Isolaccio, Talasani et Cervione.

Taglio-Isolaccio.

Regroupement des 2 hameaux dont il porte le nom, Taglio-Isolaccio, perché à 320 m d'altitude à l'extrême nord de la Costa-Verde, compte moins de 600 habitants. Le campanile de l'église San Mamilianu se repère de loin, sa croix pointe à 38 m dans le ciel, soit l'un des plus hauts de l'île.

Le village est réputé dans toute la Corse pour la qualité de ses chanteurs, qui interprètent a capella une musique traditionnelle baptisée cantu in paghjella. Il a notamment vu naître Ghjuliu Bernardini, père de Jean-François et Alain Bernardini, fondateurs en 1977 du groupe I Muvrini. Leur studio d'enregistrement est d'ailleurs toujours installé au village. En raison d'un déclin de transmission mettant en péril la survie de ce chant polyphonique ancré dans la tradition insulaire, la paghjella figure depuis 2009 au patrimoine culturel immatériel de l'Unesco.

Talasani.

Bâti à 400 m d'altitude, Talasani est un village d'environ 790 habitants situé au nord de la Costa Verde, entre Taglio-Isolaccio et Poggio-Mezzana. Comme tous les villages de montagne ayant un accès à la mer, sa partie littorale ne s'est développée que sur le tard. En Corse, pendant des siècles, les terres les plus recherchées se trouvaient en hauteur, ce qui permettait de voir arriver l'envahisseur.

Le village possède un patrimoine bâti digne d'intérêt. Il abrite notamment un nombre impressionnant de maisons des XVe, XVIe, XVIIe, XVIIIe et XIXe siècles, de superbes bâtisses en pierre ayant appartenu à des familles de notables locaux (Giafferi, Geronimi, de Corsi, Poli-Marchetti, Guerini...). La façade rose saumon de l'église Sainte-Lucie domine la place du Monument aux Morts et son obélisque commémoratif derrière lequel on peut admirer depuis 2020 une fresque murale représentant toute la population de Talasani réunie en 1914 avant le départ au front des soldats. Réalisée d'après photo par la peintre sarde Pina Mone, c'est une œuvre émouvante par son réalisme. 

Authentique village de Costa Verde, Talasani se parcourt à pied. Peu de touristes. Les chats sont chez eux, ils se promènent librement dans les rues et font de sympathiques compagnons de visite. 

Bien visible ci-dessous pour l'église Sainte-Lucie de Talasani, mais aussi pour celle de Taglio-Isolaccio plus haut : en Corse, tout le soin de l'ornementation extérieure des églises baroques se porte sur la façade. Le reste du monument est laissé brut.

Cervione.

Comme Taglio-Isolaccio et Talasani, Cervione fait partie des 9 communes de Costa Verde possédant une façade maritime. Étagé de 350 à 400 m d'altitude entre Valle-di-Campoloro et San-Giuliano, ce gros bourg chargé d'histoire s'étend sur 11 km² des pentes du Monte Castellu  jusqu'à la plage de Prunete, 5 km plus bas.

Avec environ 1800 habitants, comparé aux autres villages de la région, Cervione est déjà une petite ville. Qui fut même capitale de la Corse au XVIIIe siècle durant le règne éclair (8 mois) de Théodore Ier de Neuhoff. Militaire aventurier d'origine allemande, jugé homme providentiel pour libérer le peuple de l'emprise génoise, Théodore est nommé roi constitutionnel de Corse le 15 avril 1736. Mais impuissant dans son rôle de libérateur, faute d'appuis et de finances, il sera écarté du pouvoir malgré plusieurs tentatives de retour. Il passera 6 années en prison à Londres pour insolvabilité avant de mourir, oublié de tous et ruiné en 1756. Son histoire romanesque inspira un opéra au compositeur italien Giovanni Paisiello en 1784.

Avec lui, un autre homme a marqué l'histoire de Cervione en la personne de Mgr Alexandre Sauli, qui fit de la ville, et pour 200 ans, le siège de l'évêché d'Aléria. C'est ainsi que Cervione abrite la cathédrale Sant'Erasmu, unique cathédrale de Costa Verde. On y arrive depuis la corniche par la très commerçante et animée A Traversa (la rue principale) puis par le Carrughjiu Santa Croce jusqu'à la place de l'Église où s'élèvent les murs jaune moutarde de l'édifice baroque.

Construit en balcon au-dessus de la Méditerranée et adossé côté terre à la Castagniccia, ce n'est pas la châtaigne qui fait la réputation de Cervione, mais un autre fruit, la noisette, avec une foire dédiée chaque 3e week-end du mois d'août. Sa culture a remplacé celle du cédrat au début du XXe siècle après 3 années de gel consécutives qui ont été fatales aux vergers de cédratiers. IGP depuis 2014.     

Pause photo sur Cervione depuis la route en corniche montant au village. Visibles à gauche, les murs de la cathédrale Sant'Erasmu.

Cathédrale Sant'Erasmu de Cervione (MH depuis 1928).

Esthétique baroque caractéristique (fronton, pilastres, volutes), mais façade relativement sobre. 

Intérieur de la cathédrale Sant'Erasmu (6 photos suivantes).

Saint Érasme, patron des marins, auquel est dédiée la cathédrale. 

Sur la placette contiguë à la cathédrale, statue grandeur nature de Mgr Alexandre Sauli. Canonisé en 1904 par Pie X.

Square Jean Pinelli, sur la Traversa, buste de Pascal Paoli (1725-1807). Surnommé U Babbu di A Patria (le Père de la Patrie), il est l'une des figures emblématiques de l'histoire de la Corse, dont il fut le chef d'État éclairé de 1755 à 1769. Il dota l'île de la première constitution moderne, établissant la souveraineté du peuple corse et la séparation des pouvoirs, principes qui poseront les bases, 32 ans plus tard, de la Constitution des États-Unis. Pascal Paoli fut vaincu par les troupes de Louis XV lors de la bataille de Ponte-Novu. 

(Photos prises le 10 octobre 2023)