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Séjour Jura, été 2023. 3.Château-Chalon
Séjour Jura, été 2023. 3. Château-Chalon.
Second village du Jura labellisé "Plus Beaux Villages de France" avec Baume-les-Messieurs (à 12 km), autant Baume est hypertouristique et surfréquenté, autant Château-Chalon (environ 140 habitants) reste préservé, même en plein été. La petite cité s'est construite autour de son château et d'une abbaye bénédictine... dont il ne reste pour l'un et l'autre pas grand chose -un donjon en ruines et un pan de mur écroulé en surplomb de la vallée de la Seille. Plusieurs belvédères aménagés aux 4 coins du village permettent de profiter de cette position défensive, en nid d'aigle, avec de beaux points de vue sur les reculées environnantes et les coteaux couverts de vignes. Encépagées en savagnin, elles produisent un vin jaune réputé. Le centre-bourg conserve de nombreuses maisons vigneronnes. Grises, basses, flanquées d'un perron, elles se caractérisent par une ouverture en plein-cintre permettant de descendre directement de la rue à la cave.
A voir aussi dans le village, l'église Saint-Pierre. Couverte d'un toit en lave, elle fait corps avec le mur d'enceinte de l'ancien quartier abbatial auquel on accède par un passage voûté surmonté d'une bretèche. De l'autre côté se trouve l'ancienne école de garçons, transformée en musée. Dans une salle de classe reconstituée, avec mobilier et matériel d'époque, chacun peut prendre place derrière un pupitre et se mettre en situation d'élève à la communale.
En cet été 2023, Château-Chalon mettait à l'honneur Bernard Clavel. Franc-Comtois attaché à sa terre natale, l'écrivain, prix Goncourt pour "Les Fruits de l'hiver", tombé sous le charme de ce rustique village jurassien, y avait acheté une maison dans laquelle il vécut durant les années 1970. L'occasion de lui rendre hommage pour le centenaire de sa naissance.
Arrivée à Château-Chalon. Exposition à ciel ouvert à travers les rues du village pour célébrer les 100 ans de la naissance de Bernard Clavel. Natif de Lons-le-Saunier, l'écrivain vécut à Château-Chalon de 1970 à 1975.
Posé à flanc de falaise, Château-Chalon est un joli village aux rustiques maisons de pierre. Calme même en plein été, il est très agréable de s'y promener à la découverte de son histoire religieuse et vigneronne.
Belvédère du Petit Cour, oratoire Sainte-Anne. Bâti au-dessus de la plaine viticole mais tourné vers le village, c'est de ce petit oratoire que partait autrefois la procession de la Saint-Vernier. Créée en 1994, la Confrérie Saint-Vernier de Château-Chalon perpétue cette tradition de procession. Après avoir porté la statue en bois de leur saint patron à travers les rues du village, les membres de la confrérie, vêtus de longues chasubles jaune d'or et vertes (couleurs du vignoble) font étape chez un vigneron qui fait don de 3 clavelins destinés au trésor de la confrérie (ainsi, chaque année, 3 clavelins s'ajoutent à ceux des années précédentes pour constituer ledit "trésor", des bouteilles conservées pendant un siècle pour être transmises aux générations futures). Puis d'un belvédère, l'évêque bénit les vignes. La manifestation se termine par une messe, suivie d'un vin d'honneur offert aux villageois sur la place de l'église.
Belvédère du Petit Cour.
Panorama depuis le belvédère du Petit Cour, quadrillage de vignes sur la plaine (3 photos suivantes). Château-Chalon appartient à l'aire géographique de production du vin jaune. Une aire géographique réduite -50 hectares- également répartie sur les communes de Domblans, Nevy-sur-Seille et Ménétru-le-Vignoble, regroupant 4 appellations : Château-Chalon, Arbois vin jaune, Vin jaune de l'Étoile et Côtes-du-Jura vin jaune. AOC depuis 1936, c'est un vin sec à la robe ambrée, réputé pour ses arômes fumés.
Élaboré exclusivement à partir du cépage savagnin, le vin jaune vieillit en fûts de chêne pendant au minimum 6 ans et 3 mois. Au cours de ce processus, une partie du vin s'évapore, sans que soit rajouté du vin pour compenser la part qui s'évapore -la fameuse part des anges. Un voile de levures se forme sur le dessus, qui va protéger le vin de l'oxydation et lui conférer ses qualités organoleptiques, ses arômes complexes de notes épicées : curry, safran, gingembre, miel et noix. Perso, je suis pas fan.
Au terme des 6 ans et 3 mois de vieillissement, réalisé sans ouillage (c'est-à-dire sans combler la part des anges), le vin jaune, est mis en bouteille, soit pour 2023 une mise sur le marché du millésime vendangé 7 ans plus tôt, en 2016. Vin de garde, il peut être conservé en cave durant plusieurs décennies. Le vin jaune se vend exclusivement en contenance de 62 cl, dans une bouteille spécifique baptisée clavelin. Pourquoi 62 cl alors que la contenance classique est de 75 cl ? La différence correspond à... la part envolée des anges. Une façon de compenser les pertes de fabrication. Malin !!
Balade à travers les rues du village (7 photos suivantes). Maisons basses, harmonie du bâti aux couleurs gris et ocre du terroir.
Exemple de maison vigneronne, avec descente de cave directement sur la rue.
Dicton du cru sur le linteau. Dit comme ça... Allez, tchin !!
Rue de la Roche, une maison que l'on ne peut manquer de remarquer.
En poursuivant plus avant rue de la Roche, valises déposées au sol. Je remercie Alain David, artiste plasticien local et président de la Maison de la Haute-Seille qui, me voyant prendre des photos, est venu spontanément à ma rencontre pour échanger et m'expliquer le pourquoi de ces valises. Cette installation, réalisée dans le cadre du centenaire de la naissance de Bernard Clavel, rappelle le goût de l'écrivain pour les voyages, son itinérance à travers le monde, lui qui a déménagé une quarantaine de fois au cours de sa vie.
6 photos suivantes, la plume de l'écrivain et le pinceau du peintre : quelques uns des 14 panneaux du parcours découverte consacré à Bernard Clavel. Visibles sur les murs des maisons du village, ils présentent des phrases tirées de son œuvre littéraire (romans, contes et légendes, essais, poèmes...), illustrées de ses propres peintures.
Église paroissiale Saint-Pierre (MH en 1972). Située sur une placette, de l'autre côté du mur d'enceinte de l'abbaye bénédictine dont les bâtiments ont été presque entièrement détruits, elle abrite le trésor des Abbesses. De style roman, largement remaniée d'éléments gothiques, l'église Saint-Pierre présente un clocher à baies jumelées doté d'une tourelle d'angle. Elle est entièrement couverte en lave. Mais rien à voir avec le volcanisme, le mot désigne en Bourgogne-Franche-Comté la pierre calcaire employée comme matériau de couverture.
Clocher de l'église Saint-Pierre et sa tourelle d'angle. A noter, le sol arrivant au ras des fenêtres latérales. Une particularité qui s'explique par le fait que la placette correspond à l'emplacement de l'ancien cimetière du village, où sont enterrées 30 générations superposées de Castel-Chalonnais. Des inhumations successives qui ont élevé le sol jusqu'à son niveau actuel. Devenu trop étroit, le cimetière a été déplacé à la sortie du village en 1865, face à la tour Charlemagne.
Intérieur de l'église Saint-Pierre. L'édifice se compose d'une nef à vaisseau central voûtée d'ogives, pas de transept. Le sol est pavé de pierres tombales de notables du village.
Exemples de vitraux des bas-côtés (seconde moitié du XIXe siècle). A gauche, Sainte Anne et Saint Joachim avec Marie, enfant (Éducation de la Vierge). A droite, l'Annonciation : l'ange désigne du doigt la colombe envoyée par Dieu à Marie.
Superposition de 2 peintures murales d'époques différentes. La plus ancienne, en dessous, daterait du XVIe siècle. Très dégradée, elle représente Sainte Barbe et la tour dans laquelle son père l'avait enfermée.
Tableau représentant le Saint Suaire (XVIIe siècle).
L'église Saint-Pierre abrite le Trésor des abbesses de Château-Chalon. Parmi les différentes pièces (statues, ostensoirs, ciboires, calices...), cette statue en bois représentant Sainte Anne apprenant à lire à Marie. Dit "Éducation de la Vierge", ce thème de l'iconographie chrétienne où l'on voit Marie apprenant à lire sous le regard attentif de sa mère a été repris par de nombreux peintres, dont un très beau Georges de La Tour.
Église Saint-Pierre, portail d'entrée en plein-cintre couvert d'un auvent. Dans un renfoncement à droite, chapelle Saint-Thiébaud (2 photos suivantes), petit oratoire édifié en 1571 en l'honneur de saint Thiébaud (XIe siècle), également connu sous le nom de Thibault de Provins, issu de la famille des Comtes de Champagne.
Grande croix en fonte devant le porche d'entrée de l'église Saint-Pierre.
Du puissant domaine abbatial constitué de l'église, d'un palais, de corps de logis pour les religieuses, de bâtiments comprenant cours, terrasses, pigeonnier, puits et écuries, il ne reste que 3 éléments dont le passage voûté, visible ci-dessous. Muni d'une bretèche, c'est par ce portail que l'on pénétrait dans le quartier abbatial. Autre vestige du quartier abbatial, le Froid Pignon, à droite sur la photo. Ancienne hostellerie des chanoinesses, le bâtiment du XVIe, remanié au XVIIe, a conservé son échauguette. Devenu la Maison de la Haute-Seille, il accueille aujourd'hui un bureau d'informations touristiques ainsi qu'un musée interactif sur le patrimoine jurassien.
Portail d'entrée du quartier abbatial, XVIe siècle. Un village, 2 églises séparées. D'un côté du portail, l'église paroissiale (Saint-Pierre) ; de l'autre, l'église abbatiale. A noter, la bretèche ("souriante") au-dessus du portail. Positionné en surplomb d'un passage, ce petit avant-corps avait une fonction défensive. Le sol, percé, permettait de tirer en cas de danger.
Côté quartier abbatial. A gauche sur la photo, le toit pointu du colombier, seul vestige du quartier abbatial avec le portail et le Froid Pignon. L'abbaye a été démantelée à la Révolution. Ses pierres furent utilisées pour construire les maisons du village. Une école laïque a été édifiée à l'emplacement de l'ancienne l'église.
Construite sur le site de l'ancienne église abbatiale, l'école du village a ouvert ses portes en 1884, sous la IIIe République. Le Président de l'époque était Jules Grévy. Pendant un peu plus d'un siècle, 26 instituteurs et institutrices se sont succédé, jusqu'en 1988, date à laquelle l'école a fermé. Pas assez d'inscrits. En 2002, les locaux sont aménagés en mini musée baptisé "l'École d'autrefois", avec reconstitution d'une salle de classe des années 1920 (10 photos suivantes). Dans un décor fleurant bon le bois, le poêle et la craie, le visiteur est invité à choisir sa place face à l'estrade. Des cahiers sont disposés sur les pupitres. Encre violette et plume Sergent-Major. Preuve par neuf, règle de trois. Un bonnet d'âne trône sur l'armoire. Sur le tableau noir figure l'énoncé d'un problème où il est question de contenance et de pourcentage. Sur un autre, la leçon de morale du jour. Les murs sont couverts de cartes géographiques et de planches anatomiques. Dans la bibliothèque se côtoient des ouvrages sur le domaine colonial français et le guide du certificat d'études... On peut se servir de tout, tout ouvrir, tout consulter. Je recommande vraiment la visite de ce petit musée (participation symbolique d'1,50 €) dans lequel tout est d'époque, authentique. Ci-dessous, photo d'une classe de l'école de Château-Chalon en 1928 avec l'instituteur et ses élèves... Prendre le temps de détailler les visages, ça vaut le coup !!
Tabliers et bérets d'écoliers accrochés aux porte-manteaux.
Tout c'que j'aime... mes cauchemars d'enfant.
Auteur prolifique, Bernard Clavel nous a laissé une centaine de livres, essentiellement des romans, mais aussi des livres pour enfants, des essais et de nombreux articles. On lui doit notamment "La Grande patience", "La Maison des autres", "Les Fruits de l'hiver", "Les Colonnes du ciel", "La Saison des loups", "Harricana", "Malataverne", "L'Angélus du soir", "L'Hiver" ainsi que la préface du "Talon de fer" de Jack London et la postface de "Maria Chapdelaine". Dans le cadre des installations proposées à l'occasion du centenaire de sa naissance, la cour de l'ancienne école communale accueille 10 plaques blanches (3 photos suivantes) évoquant chacune une histoire des contes et légendes du romancier, mise en relief par le sculpteur Jacques Thibaut.
Parmi lesquelles, "Félicien le fantôme".
Et "La Reine de la Baltique".
Poursuivant ma balade à travers les rues de Château-Chalon, rue Saint-Jean, cette maison à tourelle, parmi les plus vieilles du village.
Quelques dizaines de mètres plus loin se trouve un second belvédère, le belvédère Saint-Jean (10 photos suivantes).
C'est le belvédère "carte postale" de Château-Chalon. Vu imprenable sur les maisons du village serrées autour de l'église Saint-Pierre, les jardins en terrasses, la plaine viticole et, au loin, les reculées.
Toujours dans le cadre de l'expo célébrant le centenaire de la naissance de Bernard Clavel, cette installation baptisée "Pays sage", signée Alain Plésiat. Prenant pour point de départ le roman "L'Hiver", dans lequel figure une photo prise depuis ce belvédère, l'artiste plasticien sculpteur et photographe installé à Château-Chalon a imaginé 4 cadres disposés côte à côte sur le muret. Placés à l'endroit exact de la vue qu'ils représentent, il a créé 3 tableaux à 3 saisons différentes (printemps, automne, hiver), chacun inspiré par les couvertures de 3 romans de Clavel : "Le Cavalier du Baïkal", "La Lumière du lac" et "La Saison des loups". L'idée est intéressante, c'est plein de poésie et très bien fait.
"Le Cavalier du Baïkal", automne.
"La Saison des loups", (tome 1 des "Colonnes du ciel"), hiver
"La Lumière du lac" (tome 2 des "Colonnes du ciel"), printemps.
Le dernier cadre est vide... L'été, vécu en direct !!
Le belvédère de Rochette (6 photos suivantes) se situe dans le quartier de l'ancienne abbaye, dont on distingue les murs d'enceinte.
En ruines mais encore debout, la maison de l'abbesse fait corps avec l'éperon rocheux. La petite tourelle en saillie servait d'oratoire à la religieuse.
"Libre de Fer", œuvre signée Romain Bresson. Avant de devenir écrivain, Bernard Clavel a exercé de nombreux métiers (apprenti pâtissier à 14 ans puis vigneron, lunetier, bûcheron, manœuvre, jardinier et même lutteur de foire) qui font forgé son caractère. C'est pour rendre hommage au peintre de la condition humaine, auteur d'une œuvre prolifique marquée par le réalisme social, que Romain Bresson a imaginé cette main géante, réalisée avec des matériaux de récupération. Une autre main dans la paume lui fait écho, la main qui donne et la main qui reçoit.
Panorama sur le site viticole et les reculées depuis le belvédère de Rochette.
Village de Nevy-sur-Seille, au coeur des vignes et des reculées du Jura (en arrière-plan la reculée de Baume-les-Messieurs).
Village de Voiteur.
A la sortie du village, la tour Charlemagne (2 photos suivantes). Vestige du donjon de l'ancien château comtal érigé au XIIe siècle -et donc bien postérieure à Charlemagne, malgré ce que prétend son nom- cette tour munie d'un pont-levis était destinée à la surveillance de la route du sel qui passait en contrebas, ainsi qu'à la protection des religieuses et villageois de Château-Chalon. Partiellement détruite en 1595 lors de l'attaque du duc Charles de Gontaut-Biron (maréchal de France exécuté à la Bastille pour conspiration contre Henri IV), comme l'abbaye, la tour servira de carrière de pierre pour la construction des maisons du village. En 1921, une partie des murs encore debout s'effondre, obligeant à poser un échafaudage de soutènement. Désormais, la tour est gardienne du repos éternel des Castel-Chalonnais inhumés dans le cimetière, situé juste en face.
A proximité de la tour Charlemagne, au niveau de l'aire des camping-cars, statue de la Vierge Marie, mains ouvertes vers le ciel.
(Photos prises le 17 août 2023)
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Tags : Bourgogne-Franche-Comté, Jura, Château-Chalon, Plus Beaux Villages de France
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