-
Saint-Côme-d'Olt. 1. Le village.
Rattaché au Parc Naturel Régional de l'Aubrac, le village de Saint-Côme-d'Olt présente de nombreuses ressemblances avec Espalion (6 km) et Entraygues (une trentaine de 30 km), deux autres villages de la vallée du Lot que j'ai visités lors de mon séjour cet été dans l'Aveyron. Baignés par le Lot (Olt en langue d'oc), ce sont tous des villages médiévaux fortifiés, tous 3 datent de la même époque et présentent donc les mêmes caractéristiques en terme de patrimoine architectural -moyenâgeux et Renaissance. Autre point commun : tous 3 se situent sur la via Podiensis du pèlerinage de Saint-Jacques-de-Compostelle.
C'est par l'une des 3 portes fortifiées que l'on pénètre dans le cœur ancien de Saint-Côme d'Olt, qui a la particularité d'avoir été construit en circulade. Le mode de construction "en circulade" est une spécificité de certains villages languedociens, des villages ronds, développés en colimaçon à partir de l'église ou du château-fort central. Classé parmi les Plus Beaux Villages de France, Saint-Côme-d'Olt est remarquable par le clocher tors de son église Saint-Côme-et-Saint-Damien qui vrille au-dessus des toits de lauzes bleutées, s'élevant, telle une flamme, à 42 m dans le ciel aveyronnais. Ses ruelles pavées sont bordées de maisons typiquement moyenâgeuses ou d'hôtels particuliers Renaissance, comme la maison Dufau, la maison du Consul de Rodelle ou encore la maison Pons de Caylus. Mention spéciale à la chapelle des Pénitents, qui fera l'objet de l'article suivant. Particulièrement bien restauré, d'une belle homogénéité, Saint-Côme-d'Olt présente un visage qui n'a guère changé depuis 600 ans et mérite pleinement son classement au label des Plus Beaux Villages de France !!
Franchissement du Lot par le vieux pont, d'où l'on a une belle vue sur le village, ses toits de lauze et le clocher tors de son église.
Trait d'union entre la fin du plateau de l'Aubrac et le début de la vallée du Lot, le pont possède une croix fruste sur l'avant-bec.
Le Lot, vu du pont.
Église Saint-Côme-et-Saint-Damien, avec son clocher tors (MH depuis 1927). L'église est placée sous le double patronage de Saint Côme et Saint Damien, frères jumeaux médecins, morts en martyrs sous Dioclétien.
Le clocher tors, une forme rare. Sa flèche, haute de 18 m, vrille dans un mouvement évoquant le parcours ascendant de la prière vers le ciel. Autrefois utilisé comme tour de guet, il abrite 7 cloches dont l'une, datée de 1478, est l'une des plus anciennes d'Occitanie.
On entre dans l'église par l'un des 2 vantaux du portail Renaissance. Située à proximité directe de l'ancien château, l'église Saint-Côme-et-Saint-Damien fut construite par agrandissement de la chapelle castrale, afin de remplacer l'église primitive devenue trop petite. Antoine Salvanh, architecte et maître d'œuvre du clocher de la cathédrale de Rodez, mena les travaux.
Sur le parvis de l'église, dallage en forme de coquille saint-jacques.
Comme l'atteste la photo, les sculptures du trumeau et du tympan sont très dégradées. Au sommet, une statue de la Vierge à l'Enfant ; de chaque côté, 2 évangélistes ont perdu la tête ; en bas, l'apôtre Pierre.
Construit en chêne et daté du XVIe siècle, le portail de l'église Saint-Côme-et-Saint-Damien est absolument magnifique (inscrit aux MH en 1908). Il comporte 2 vantaux entièrement cloutés et sculptés chacun de 15 médaillons représentant les membres bienfaiteurs de la Maison d'Estaing. Ci-dessous : détails de 2 médaillons du vantail droit.
Tête de femme de profil, avec la date : 1532.
Tête d'homme encastrée dans na niche.
En ces temps de Covid...
Croisées d'ogives de la nef et du chœur. On aperçoit au fond, dans le chœur, la statue en bois de noyer du Christ en croix (XVe siècle).
Dernière station du chemin de croix.
Ruelle typique de Saint-Côme-d'Olt.
La tour du Greffe, avec son portail gothique et ses fenêtres à meneaux. Elle fut le siège de la cour de justice locale jusqu'à la Révolution et jouxte aujourd'hui le bâtiment d'accueil des pèlerins.
Porte d'entrée de la Maison des Consuls de Rodelle. Cette maison Renaissance, à la porte surmontée d'un arc en accolade et d'une clef de voûte sculptée à tête de gorgone, abrita Antoine Salvanh, maître-maçon concepteur de la nouvelle église et du clocher tors.
Autre portail d'époque.
Double passage voûté de la rue du Four.
Dans le village, les plaques de rues sont blasonnées et affichent en premier leur nom occitan.
C'est au niveau de ce double passage voûté que se trouve la Maison Pons de Caylus (porte d'entrée dans l'angle, sous l'arcade droite), du nom d'un avocat au Parlement qui l'acheta à la fin du XVIIe siècle. Une tour lui est accolée, qui servait à l'origine de poste de guet et de pigeonnier.
Tour de la Maison Pons de Caylus. Cette maison noble est une ancienne dépendance du château. Lorsque Pierre Pons de Caylus l'acheta, il dut accepter de découronner la tour (la réduire en hauteur) afin qu'elle ne soit pas plus haute que les tours du château.
L'ancien château des Castelnau de Bretenoux (façade sud). Daté du XIIe siècle et intégré au rempart primitif, l'ancien château possède 2 tours d'aspect typiquement défensif avec corbeaux et archères. Il abrite aujourd'hui la mairie.
Maison au toit en forme de carène, avenue de Saint-Geniez. Cette forme de toit est une caractéristique particulière à la vallée du Lot.
Maisons jumelles au toit en forme de carène.
Maison Dufau. Elle doit son nom à une famille de notaires qui en étaient propriétaires. Elle est surmontée d'un pigeonnier.
Porte d'entrée de la Maison Dufau, rue Sainte-Marie.
Ancien pigeonnier de la Maison Dufau.
L'Ouradou. Petit édifice au toit de lauze octogonal, l'Ouradou abrite en son centre une croix ouvragée en fer forgé. Il fut construit à la mémoire des victimes de la peste de 1586, épidémie qui décima les 3/4 de la population. Son nom signifie "oratoire" en occitan.
(Photos prises le 18 août 2021)
votre commentaire -
Entraygues-sur-Truyère, et aussi sur le Lot.
Mon périple estival en Aveyron se poursuit : me voici à Entraygues-sur-Truyère, à une trentaine de km au nord-ouest d'Espalion, où je me trouvais dans mon précédent article. Rattachée au Parc Naturel Régional de l'Aubrac, Entraygues est un village de moins de 1000 habitants qui offre au visiteur le double caractère de son passé fluvial et moyenâgeux.
Sa situation particulière au confluent du Lot et de la Truyère, "entre les eaux" -comme l'indique son nom occitan- fit d'Entraygues un important port fluvial au XIXe siècle. Les marchandises (vin, poisson, fromage, épices, bois...) étaient acheminées en gabarre, de grands bateaux à fond plat pouvant transporter jusqu'à 25 tonnes de frêt. Cette période de prospérité entraina un essor démographique (le triple de la population actuelle lors du recensement de 1846)... Clap de fin avec l'arrivée du chemin de fer. Le ferroviaire a porté le coup de grâce à cette florissante histoire économique, avec un déclin constant de la population entrayolle depuis.
Outre l'intérêt de ce pan récent de son histoire, Entraygues vaut aussi par l'important bâti médiéval et Renaissance qu'elle a conservé dans son jus. Il n'y a qu'à se promener dans la rue Droite ou la rue Basse pour s'en convaincre, elles abritent toutes 2 de nombreuses maisons à encorbellement et colombages des XVe et XVIe siècles. Autres témoins du Moyen Age, les cantous, de pittoresques passages couverts qui faisaient communiquer 2 rues entre elles. A voir aussi, les 2 ponts à arches ogivales, l'un sur la Truyère, l'autre sur le Lot.
Passerelle sur le Lot, un spot prisé des pêcheurs dans cette rivière aux eaux vives où frétillent truites et gardons. Située le long de la D920, la passerelle mène, par le quai des Gabarres, jusqu'au confluent du Lot et de la Truyère.
Confluence, le Lot reçoit les eaux de la Truyère. Là aussi, ça taquine le poisson.
Pont gothique sur la Truyère (rivière de 167 km née dans le Massif Central, affluent du Lot et sous-affluent de la Garonne). Daté du XIVe siècle, ce pont à 4 arches ogivales accueillait à l'origine marchands et colporteurs. Il était doté de 2 tours de péage.
Place Albert-Castanié. Ex place Mage (c'est-à-dire grand-place, place majeure), elle a été rebaptisée en hommage à Albert Castanié, chef de la Résistance d'Entraygues, tué le 16 août 1944 par les Allemands.
Appelée "Demeure noble", la grosse maison Renaissance à gauche sur la photo aurait abrité Marguerite de Valois dans la nuit du 27 au 28 septembre 1585. Elle se trouve à l'angle de la place Albert-Castanié et de la rue Basse, l'une des plus pittoresques rues d'Entraygues.
7 photos suivantes : exemples de bâti dans les rues Basse et Droite (XVe, XVIe et XVIIe siècles). A noter que les maisons des gens aisés étaient entièrement construites en pierre (à droite) alors que seul le soubassement était en pierre pour celles des petites gens, le reste étant ensuite monté avec du torchis soutenu par des colombages en bois (à gauche).
Porte de la maison Vallette (XVIe siècle, classée MH en 1928). Situé rue Droite, ce superbe portail en bois et encadrement en pierre taillée a la particularité de posséder 2 heurtoirs superposés. Celui du bas était destiné aux piétons, celui du haut (caché par la plante sur la photo), aux cavaliers. L'établissement était à l'origine une auberge.
En poussant un peu le feuillage... Ça aurait été dommage de ne pas le découvrir : heurtoir pour cavaliers sur la Porte Vallette.
Entraygues possède de nombreux passages couverts (5 photos suivantes). Appelés "cantous", ces passages couverts, utilisés par les habitants, servaient aussi à raccourcir le temps de trajet de la garde vers les murs d'enceinte en cas d'intervention urgente.
Photo prise ruelle de l'horloge, un passage qui reliait le chemin de ronde à la rue commerçante.
Le Pont d'Olt (ou Pont Notre-Dame), à la sortie sud d'Entraygues. Construit sur le Lot à la fin du XIIIe siècle, c'est un pont en granit à 4 arches ogivales et piles à avant-becs triangulaires.
Le Pont d'Olt, effet miroir.
Il voyage sur 480 km (7e cours d'eau de France par la longueur). En arrivant à Entraygues, le Lot a déjà parcouru 210 km depuis sa source, passant à Mende, Saint-Geniez-d'Olt, Espalion et Estaing. Passé Entraygues, il arrose encore Capdenac, Saint-Cirq-Lapopie, Cahors, Fumel et Villeneuve-sur-Lot, avant de finir sa course dans la Garonne à Aiguillon.
(Photos prises le 18 août 2021)
votre commentaire -
Espalion, entre monts d'Aubrac et causse, charmante petite ville de l'Aveyron sur le Lot.
Voilà une ville que j'ai pour la première fois visitée lors de mon séjour dans l'Aveyron cet été et que j'ai tout de suite beaucoup aimée !! Baignée par les eaux du Lot et dominée par le château en ruines des seigneurs de Calmont, Espalion est une petite ville pittoresque à taille humaine (environ 4 500 habitants), blottie entre monts d'Aubrac et causse. Son terroir régional singulier la rend très attachante.
Située sur la voie du Puy-en-Velay des chemins de Compostelle, Espalion abrite bon nombre de monuments historiques d'intérêt, particulièrement bien mis en valeur : le Pont-Vieux, le Vieux-Palais, les calquières et plusieurs édifices religieux, dont la très belle chapelle de Perse. Il y a aussi plusieurs musées atypiques. Ajouté à cela le Foirail, sorte de grand mail aux allées ombragées, où se négociaient autrefois œufs, cochons et volailles. En bordure de Lot, très prisé des promeneurs, il faut s'y rendre pour apprécier l'un des meilleurs points de vue sur la ville.
Les calquières, habitations séculaires en rive droite du Lot, sont d'anciennes tanneries. Un indéniable atout touristique d'Espalion.
Enfilade de calquières et leurs gandouliers. Serrées les unes contre les autres, ces pittoresques maisons au toit pointu et aux balcons de bois en encorbellement au-dessus de la rivière servaient autrefois de tanneries. Elles disposaient chacune de leurs gandouliers, des dalles en pierre dont la disposition, en escaliers, permettait de laver les peaux quel que soit le niveau de l'eau (la tannerie fut pendant des siècles l'industrie la plus prospère d'Espalion).
Autre succession de calquières, entre les 2 ponts.
Le Pont-Vieux (fin XIIIe siècle). Construit en grès rose sur le Lot, c'est LE monument carte-postale de la ville. Les seigneurs de Calmont prélevaient autrefois un droit de péage pour y circuler. Il était alors doté de 3 tours, de boutiques et d'un pont-levis. Inscrit aux MH en 1888.
Aujourd'hui interdit à la circulation automobile, le Pont-Vieux voit chaque année passer les troupeaux en transhumance vers l'Aubrac.
Le Pont-Vieux et le Vieux-Palais (photo prise du Foirail). Dressé sur un éperon rocheux en bordure de Lot, le Vieux-Palais fut construit en 1572 par le capitaine Bernardin de La Vallette, noble au service des seigneurs de Calmont durant les guerres de Religion. De style Renaissance, avec ses fenêtres à meneaux, sa tour en poivrière et sa loggia, il est aujourd'hui résidence d'artistes.
Statue d'un tailleur de pierre, avec la coquille du pèlerinage de Saint-Jacques. Commandée par René Mouysset, ancien président de la Fédération Française du Bâtiment (FFB), ayant lui-même parcouru le chemin jusqu'à Saint-Jacques-de-Compostelle, cette statue a été installée en 2015 sur le Foirail d'Espalion. Elle est l'œuvre de Nicolas Clerget.
Boule en main, il s'apprête à frapper le quillou... Cette statue, représentant un joueur de quilles de 8 (œuvre de Michel Besson), a été installée sur le Foirail en 1992. Encore très populaire dans l'Aveyron, le jeu consiste à faire tomber 8 quilles posées au sol à l'aide d'une 9e quille (appelée quillou), lancée à l'aide d'une boule. Une partie se joue en 9 coups, jusqu'à 20 m de distance.
Portail de la chapelle des Ursulines. Cette porte en trompe-l'œil est un vestige de l'ancien couvent des Ursulines (XVIIe siècle), qui se trouvait à l'extérieur des faubourg clos d'Espalion et qui a été démoli en 1968. Remonté rue Saint-Joseph en 2001, le portail est encadré par 4 colonnes à chapiteaux corinthiens. De chaque côté, les niches (aujourd'hui vides) abritaient les statues de Sainte Ursule et Saint Augustin. On aperçoit au-dessus du linteau le blason des seigneurs de Calmont.
(Première) église Saint-Jean-Baptiste. Ancienne église paroissiale, cette première église Saint-Jean-Baptiste a perdu son statut religieux en 1883 avec la construction d'une nouvelle église (du même nom), plus grande, juste en face. Hôtel-de-ville pendant une cinquantaine d'années, elle fut ensuite reconvertie en musée. Le monumental escalier à double volée de marches conduit au 1er étage où se trouve, depuis 1975, le Musée Vaylet des Arts et Traditions Populaires.
Mais quel est ce curieux objet ventru planté là devant l'église ?... Son apparence et sa couleur n'ont pas manqué d'attirer mon attention. Ce n'est qu'en approchant que j'ai eu la réponse : un scaphandre !! Car en plus d'abriter le Musée Vaylet, l'ancienne église abrite aussi le musée du Scaphandre. Pas banal. C'est d'ailleurs le seul en France. Le musée a été créé en hommage à Auguste Denayrouze et Benoît Rouquayrol, 2 Espalionnais, inventeurs, en 1864, du 1er scaphandre autonome moderne.
Autre musée d'Espalion : le Musée des mœurs et coutumes du Rouergue. Aménagé dans les anciennes prisons de la ville, en plus des objets présentés, il permet de découvrir la prison d'Espalion, une prison à l'époque novatrice en matière d'hygiène avec des cellules individuelles chauffées pour chaque détenu, et un quartier différencié hommes/femmes. La prison fut en service de 1844 à 1933.
Axé sur les coutumes locales, le musée présente sur 600 m² une collection d'objets anciens du quotidien parmi lesquels de nombreuses pièces de vaisselle en cuivre et poteries.
Église Saint-Hilarian-Sainte-Foy-de Perse (classée MH en 1864). Plus simplement appelée chapelle de Perse, c'est un édifice d'origine pré-romane, situé à une petite vingtaine de mn de marche du centre-ville, dans l'enceinte du cimetière. Elle fut longtemps l'église paroissiale d'Espalion, avant la construction, en plein centre, de l'église Saint-Jean-Baptiste (celle-là même transformée en musée du scaphandre).
Grès rose et toit d'ardoise bleue, la chapelle de Perse arbore un clocher-peigne percé de 4 arcades. A la fois rudimentaire et robuste, ce type de clocher se rencontre surtout sur les églises romanes des campagnes du sud de la France. Sorte de mur rectangulaire, simple dans sa conception, il ne nécessitait pas le recours à un architecte.
Portail de la chapelle, profusion décorative. A noter, le linteau et le tympan richement sculptés ainsi que l'archivolte, dont 2 des 3 voussures sont historiées.
Le linteau monolithe évoque l'Apocalypse et le Jugement Dernier. On y retrouve les mêmes représentations qu'à Conques, avec la pesée des âmes, les élus soulevés par les anges et les damnés enfournés dans la gueule du monstre. Le tympan est une évocation d'un thème plus rare : celui de la Pentecôte, avec la descente de l'Esprit-Saint (langues de feu) sur les apôtres.
Au-dessus du portail, représentation des Rois Mages, les bras chargés d'offrandes.
A l'intérieur, croisée d'ogives de la voûte du transept.
Sur l'un des chapiteaux, représentation de 2 oiseaux buvant dans un calice.
Statue d'un pèlerin.
Perché à 535 m sur son promontoire de basalte, le château (en ruines) de Calmont-d'Olt vu depuis le cimetière de la chapelle de Perse.
(Photos prises le 17 août 2021)
votre commentaire -
Conques. 2. L'abbatiale Sainte-Foy.
Dédiée à Sainte Foy, jeune chrétienne morte au début du IVe siècle, victime des persécutions romaines, l'abbatiale de Conques occupe une place prééminente dans l'histoire de l'art roman en Occitanie, dont elle est indiscutablement l'un des chefs-d'œuvre (inscription aux MH en 1840 et au patrimoine mondial de l'Unesco en 1998).
Les contraintes topographiques induites par la déclivité du terrain ayant obligé les bâtisseurs à raccourcir la nef (20 m) au profit du transept (35 m) et à augmenter la hauteur de l'édifice, l'impression de grandeur et de solennité quand on se trouve au pied de l'abbatiale est saisissante. Vaisseau de pierre aux 10 siècles d'histoire, à l'origine bénédictine, Sainte-Foy abrite aujourd'hui une communauté de moines Prémontrés.
Considéré comme une merveille de la sculpture romane, le tympan du Jugement Dernier se découvre au-dessus du large trumeau séparant les 2 portes de la façade principale. Il est magnifique !! Aussi, ne pas entrer trop vite dans l'église. Puisque Conques est un lieu de prière et de recueillement, prendre le temps. Le temps de s'attarder sur le parvis pour détailler la centaine de personnages mis en scène, élus et damnés, autour du Christ en majesté.
En pénétrant dans l'abbatiale, 3 choses m'ont immédiatement frappée : la verticalité de l'édifice, sa grande sobriété, et la lumière qui baigne l'intérieur. Une lumière blanche, quasi spectrale, diffusée par les vitraux très épurés de Pierre Soulages.
Façade ouest, avec, au-dessus des 2 portes d'entrée, le tympan du Jugement Dernier. Grandiose !! De l'extérieur comme à l'intérieur, la verticalité de l'édifice est impressionnante.
Le tympan de l'abbatiale Sainte-Foy (XIIe siècle). Le tympan mesure près de 4 m de hauteur pour 7 de long. Évocation du Jugement dernier selon l'Évangile de Saint Matthieu, il présente une foule de personnages répartis, autour de la figure centrale du Christ (1,16 m), entre paradis et enfer. Je ne les ai pas comptés, il paraît qu'il y en a 124 au total. Une œuvre sculptée magnifique, dont les 9 photos suivantes détaillent l'iconographie.
Le Christ trône en majesté dans un ciel étoilé. Sa main droite, levée, accueille les élus au paradis tandis que sa main gauche, baissée, désigne l'enfer aux damnés. 2 mondes opposés présentés "en images", de façon pédagogique, pour frapper les esprits d'un peuple qui, majoritairement, ne savait pas lire.
La Vierge Marie conduit le cortège des élus, suivie de Saint Pierre, tenant les clefs du paradis, puis de l'ermite Dadon.
Sortant des nuages, la main de Dieu bénit Sainte-Foy. Entre histoire et hagiographie, la vie de la petite sainte reste empreinte de mystère. Native d'Agen et fervente chrétienne, elle serait morte à 12 (13 ?) ans, persécutée au tout début du IVe siècle par les Romains.
La pesée des âmes. Tandis que Saint Michel pèse les âmes dans sa balance, un démon roué tente de le gruger en faisant pression d'un doigt sur le plateau... pour qu'il penche de son côté.
La porte de l'enfer. Il y a, du bon côté, les élus, qu'un démon regarde lui échapper. De l'autre côté, les damnés sont poussés par ce même démon dans la gueule béante d'un monstre.
Représenté surdimensionné par rapport aux autres personnages, Satan, au centre du tableau, règne sur l'enfer grouillant des damnés. Corps entremêlés, suppliciés... La petite boutique des horreurs !!
Péché de paresse : un damné, immobilisé pour l'éternité sous les pieds de Satan.
Péché d'avarice : un homme, pendu avec son argent autour du cou.
Autres pêchés et leur châtiment : pour le punir de s'être livré au mensonge, un damné, assis sur le feu, se fait arracher la langue par un démon tandis qu'un autre se fait dévorer le cerveau pour s'être laissé aller au péché de colère.
Entrée de l'abbatiale par le transept. Signe des temps, le visiteur est accueilli par un flacon de gel hydroalcoolique.
Coupole romane de la tour-lanterne. La coupole est percée de 8 fenêtres, destinées à répandre la lumière dans l'édifice.
Suspendu en hauteur entre les colonnes de l'abside, le reliquaire de Sainte Foy est l'œuvre de l'orfèvre Goudji (à qui l'on doit également la "couronne de lumière" placée au-dessus de l'autel dans la collégiale Saint-Liphard, à Meung-sur-Loire). Il a été béni en 2014 et contient une relique de la sainte. A noter la grille en fer forgé (XIIe siècle), considérée comme l'une des plus belles réalisations de ferronnerie de la période médiévale.
L'abbatiale Sainte-Foy est réputée pour sa statuaire. Dans le transept nord, un haut-relief illustre l'Annonciation. Haut-relief... placé, pour le coup, très en hauteur : à 8 mètres du sol !! Pas aisé à détailler...
Les vitraux de Soulages. Inaugurés en 1994, épurés jusqu'à l'austérité, ils baignent les lieux d'une lumière blanche quasi spectrale.
Ces sarcophages, alignés en haut de l'escalier Saint-Jacques, face à l'hôtellerie des pèlerins, ont été mis à jour à l'intérieur de l'abbatiale lors de travaux de déblaiement conduits par Prosper Mérimée. Ils ne présentent cependant que peu d'intérêt.
Exploité en carrière par les villageois durant la Révolution, du cloître originel ne subsiste que la galerie occidentale à baies géminées. Le trésor -pièces d'orfèvrerie, parmi lesquelles une statue reliquaire en or et pierres précieuses de Sainte Foy- se trouve dans l'ancien réfectoire, à gauche sur la photo (accès payant). Au centre, un bassin en serpentine dans lequel les visiteurs jettent la pièce.
Autrefois abbaye bénédictine, l'abbatiale Sainte-Foy abrite aujourd'hui une communauté de Prémontrés, dévoués à l'hospitalité et l'accueil des pèlerins. Il n'est pas rare de croiser la silhouette blanche de quelque frère, vaquant à ses occupations.
Un imposant tilleul garde le lieu. Au fond, les bâtiments d'hébergement des pèlerins.
Le cloître comporte de nombreux chapiteaux sculptés, dont celui-ci figurant les moines bâtisseurs.
(Photos prises les 15 et 17 août 2021)
votre commentaire