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Un petit tour sur le port de Propriano.
Nichée au fond du golfe de Valinco, à mi-distance entre Ajaccio et Bonifacio, la petite ville de Propriano, en Corse-du-Sud, présente une physionomie plutôt moderne. Il ne faut pas s'attendre à y trouver le cachet des villages de montagne, le bâti ici est récent. Rien de particulièrement remarquable, rien de mirobolant. Et pourtant, le charme opère. J'ai beaucoup aimé flâner du côté du port de plaisance. Avec sa succession de maisons aux différentes nuances d'ocre jaune et orange serrées les unes contre les autres en arrière-plan des bateaux, on le reconnaît entre mille. L'endroit est animé, sans trop. Des petits restaurants aux terrasses ensoleillées, quelques embarcations de pêcheurs, beaucoup de voiliers dont les mâts cliquètent au vent. La Méditerranée au bout de l'embarcadère, le grand large... "Emmenez-moi" ♫♫♪♪♫
Ben non, c'est pas le mien...
(Photos prises le 11 mai 2022)
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Couvent Saints-Côme-et-Damien, la tradition franciscaine à Sartène.
Dans la continuité de l'article précédent, voici le couvent dans lequel se passe la retraite spirituelle du catenacciu avant son chemin de croix, le Vendredi Saint, dans les rues de Sartène.
Comme son nom l'indique, le couvent est dédié à 2 saints : Côme et Damien. Nés sous Dioclétien au IIIe siècle en Asie Mineure, Côme et Damien étaient frères, chrétiens et tous 2 médecins. Profondément croyants, ils prodiguaient leurs soins gratuitement en prêchant la Parole divine. Arrêtés par les hommes du proconsul Lysias pour prosélytisme puis martyrisés après avoir refusé d'abjurer leur foi, on leur attribue plusieurs guérisons miraculeuses posthumes, dont celle, légendaire, de la jambe noire : un sacristain à la jambe gangrénée fut greffé avec la jambe noire d'un Éthiopien décédé. Guéri, il se retrouva avec une jambe blanche... et l'autre noire !! Très populaires en Corse, et notamment à Sartène, Saint Côme et Saint Damien y sont fêtés chaque année le 26 septembre. Saint Côme est le patron des chirurgiens, Saint Damien celui des pharmaciens.
Fondé en 1862 à la sortie ouest de la ville, en surplomb de la vallée du Rizzanese, le couvent Saints-Côme-et-Damien perpétue la tradition franciscaine à Sartène depuis le XVIIe siècle. Faute de vocations, les moines, d'abord tous originaires de Corse, furent remplacés au fil du temps par des congrégations italiennes, belges, puis mexicaines. Plus de frères cependant depuis le retour au pays de la congrégation mexicaine en 2021. Ce sont désormais des clarisses -la branche féminine des franciscains- qui occupent le couvent. Les moniales ont quitté Bastia après 170 années de présence pour venir s'installer à Sartène. Dans ces lieux propices à la contemplation et à la prière, les sœurs diffusent leur message de piété, de simplicité et d'humilité.
Grand crucifix à l'entrée du couvent Saints-Côme-et-Damien.
Façade de l'église conventuelle. Le couvent lui-même est attenant à l'église (on distingue une partie de son mur à droite sur la photo).
Intérieur de l'église conventuelle, baignée de lumière. Visible dans le transept, ND de la Paix.
A l'entrée de l'église, superbe tombeau de marbre blanc érigé à la mémoire de Joseph Bartoli, bienfaiteur des franciscains de Sartène décédé en 1911. En 1907, Joseph Bartoli racheta le couvent Saints-Côme-et-Damien pour le restituer aux pères Franciscains auxquels il avait été confisqué 2 ans plus tôt lors de la Loi de séparation de l'Église et de l'État.
Statue de Saint Jean-Baptiste.
3e station du chemin de croix : Jésus tombe pour la première fois sous le poids de la charge, Simon de Cyrène l'aide à se relever. La procession du Catenacciu reprend l'épisode du chemin de croix vécu par Jésus montant au calvaire.
Parvis avec l'église conventuelle (1872), à gauche et le couvent franciscain (1862) attenant, où se recueille chaque année l'homme choisi pour être le catenacciu. Plus d'infos ici ► Sartène et la procession du catenacciu.
(Photos prises le 11 mai 2022)
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Sartène, forteresse de montagne et son Catenacciu.
Préfecture de Corse-du-Sud robustement arrimée à son bloc de rochers, Sartène domine à 320 m d'altitude la vallée du Rizzanese et le golfe de Valinco, sur lequel est établie la petite ville portuaire de Propriano. Ajaccio se situe à 80 km. Avec ses quelque 3 250 habitants, Sartène est la 2e plus grande ville de montagne de l'île après Corte, en Haute-Corse (environ 7 500 hab). Mais autant Corte, cité étudiante (seule université de Corse) présente avec ses nombreux immeubles une physionomie moderne, autant Sartène, du point du vue du bâti et des traditions, est restée dans son jus. Ce qui ne l'empêche pas d'être bien vivante.
Fondée par les Génois au début du XVIe siècle sur un promontoire d'accès difficile, Sartène fut rapidement dotée de remparts pour protéger la population des attaques barbaresques et des razzias du corsaire turc Dragut. La ville abrite de cette époque une citadelle à l'intérieur de laquelle se trouve le pittoresque quartier du Pitraghju. Avec son dédale de passages voûtés, de ruelles pavées, étroites, sombres, bordées de hautes maisons grises reliées entre elles par des arches de pierre, il ne faut pas manquer de s'y "aventurer".
On accède au Pitraghju par un escalier à flanc de rocher depuis la route en contrebas ou -plus en douceur- par le passage voûté de l'ancien palais des Gouverneurs (aujourd'hui hôtel-de-ville), place de la Libération. C'est sur cette place très animée que se trouve l'église Santa-Maria-Assunta, d'où part chaque année la procession du Catenacciu. Accrochées au mur, à gauche en entrant, sont exposées la croix et les chaînes portées, dans une dramaturgie impressionnante, le soir du Vendredi Saint, par le pénitent rouge.
Abondance de robiniers en fleurs devant les hautes maisons de Sartène.
Serrées les unes contre les autres, ces hautes maisons en granit donnent à Sartène un aspect un peu sévère. Elles sont dominées par le clocher à 3 étages de l'église Santa-Maria-Assunta, dans laquelle sont exposées la croix et les chaînes du Catenacciu.
"L'Atlante", signé Noël Bonardi. Né et mort en Corse (1934-2012), Noël Bonardi a réalisé plusieurs Monuments à la Résistance sur l'île, notamment à Bastia et Ajaccio, tous puissamment expressifs. Celui-ci est visible sur le belvédère aménagé le long de la T40.
La pause s'impose pour détailler cette émouvante statue mais aussi profiter d'un très beau panorama sur Sartène, la vallée du Rizzanese et jusqu'au golfe de Valinco.
Éperon rocheux sur lequel est bâti le Petraghju, le plus ancien quartier de Sartène. Les maisons font corps avec la roche. C'est du carrefour entre la T40 et la D65 que l'on visualise le mieux la situation stratégique de la vieille ville, comme posée en équilibre sur son promontoire de granit.
Un escalier a été aménagé dans l'impressionnant bloc rocheux pour accéder directement de la route en contrebas jusqu'à la vieille ville sur les hauteurs. Un peu raide quand même...
Des anciens remparts qui entouraient initialement la ville-forteresse, seule subsiste cette échauguette (XVIe siècle, MH).
Croix et chaînes du Catenacciu exposées dans l'église Santa-Maria-Assunta de Sartène. En médaillon le pénitent rouge.
Le terme "catenacciu" se traduit par "(pénitent) enchaîné". Il désigne à la fois le pénitent ET la procession héritée du Moyen Age qui commémore la montée du Christ au calvaire. Chaque année, le curé de Sartène choisit parmi la liste des volontaires inscrits sur son registre (parfois depuis des années) celui qui tiendra le rôle du pénitent. Demande d'action de grâce, remerciement d'une action de grâce, expiation d'un péché... les motivations sont profondes mais secrètes, de même que l'identité de l'homme, un Sartenais qui restera à jamais anonyme. A 21 H, le soir du Vendredi Saint, la ville est plongée dans le noir. Entièrement vêtu de rouge -tunique et cagoule- croix de 33 kg sur l'épaule, chaînes de 15 kg entravant ses pieds nus, le catenacciu reproduit à la lueur des bougies le chemin de croix du Christ. 2 km à travers les rues du Vieux Sartène, depuis l'église Santa-Maria-Assunta jusqu'au couvent Saints-Côme-et-Damien à la sortie de la ville. Comme le Christ, il tombe 3 fois. Un pénitent blanc, figurant Simon de Cyrène, l'aide à chaque fois à se relever. Ils sont suivis par 8 pénitents noirs. Dans le cortège, tous les pénitents vont pieds nus. Derrière eux, la population ferme la marche en entonnant "Pardone mio Dio". Témoignage fort de la ferveur locale, la procession du Catenacciu est l'une des manifestations religieuses les plus saisissantes de Corse.
Ce superbe bâtiment en pierre du XVIe siècle situé place de la Libération (place sur laquelle se situe également l'église Santa-Maria-Assunta) est l'ancien Palais des Gouverneurs génois. Il abrite aujourd'hui l'Hôtel-de-Ville ainsi que la Cave Sartenaise, une épicerie fine exploitée depuis les années 50 par la famille Gambini. L'intérieur du magasin vaut aussi la visite !! Sur la droite, juste sous la mairie, le passage voûté menant au vieux Sartène est surmonté du blason de la ville. Autrefois renforcé d'un pont-levis, il commandait l'entrée à la citadelle.
De l'autre côté du passage voûté, on pénètre dans le quartier Pitraghju. Quartier piéton, très pittoresque, c'est le centre historique de Sartène. Un incroyable dédale de passages, de ruelles en escaliers, pavées, bordées de hautes maisons de pierre reliées en hauteur par des arches. La plus touristique -et fréquentée- est incontestablement la rue des Frères-Bartoli avec ses boutiques de souvenirs, de produits locaux et ses restaurants.
La mamma corse propose canistrelli, bombonetti et autres gâteaux à la châtaigne... un sympathique effort de décoration.
Place de la Vardiola.
Dans le labyrinthe des petites ruelles... Rue du Purgatoire, rue Codaccioni... passages tortueux, recoins, escaliers, fils électriques, arches de pierre, une impression que tout s'enchevêtre.
(Photos prises le 11 mai 2022)
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Corse-du-Sud, Vico et le couvent Saint-François.
Gros village de Corse-du-Sud, perché à 400 m d'altitude et baigné par les eaux du Liamone, Vico ne fait pas dans l'esbrouffe et le tape-à-l'œil. Noyé dans la verdure, c'est un authentique village de montagne, tout en longueur, avec ses hautes maisons de granit serrées les unes contre les autres et ses placettes animées. La mer la plus proche se trouve à Sagone, à une petite quinzaine de km, Ajaccio est à une heure de route.
En sortant du village, direction Arbori, veillé par la crête légendaire de la Sposata, un clocher monte au ciel à travers une mer de feuillage, celui de l'église du couvent Saint-François. Fondé en 1481 avec l'accord du pape Sixte IV par un seigneur local désireux d'adoucir son image de chef de guerre, et dédié, comme son nom le suggère à Saint François d'Assise, le couvent n'abrite plus de moines franciscains depuis 1836. De nos jours, c'est une communauté de Missionnaires Oblats de Marie Immaculée qui y vit. Proposant des séjours de retraite spirituelle, les Missionnaires de la petite communauté ouvrent aussi leurs portes chaque été au festival "Sorru in Musica". A voir dans l'église conventuelle, un grand Christ en croix, frappant de réalisme, le plus ancien Christ en bois polychrome de Corse.
Le village de Vico, niché dans son amphithéâtre de verdure au creux du massif de la Sposata.
Rue typique de Vico, avec ses maisons en pierre reliées les unes les autres par des ruelles en escaliers.
Autre rue du village.
Au centre de la place principale de Vico se dresse une statue en bronze érigée à la mémoire de Mgr Casanelli d'Istria (1794-1869). Ancien évêque d'Ajaccio et orateur de talent, l'évêque a beaucoup prêché pour que cesse la vendetta en Corse.
Au pied du massif de la Sposata, le clocher du couvent Saint-François émerge de la forêt (au centre sur la photo). Le massif de la Sposata culmine à 1 191 m d'altitude. Il tient son nom, se traduisant par "épouse", d'une légende rattachée au piton cerclé en rouge dont la forme évoque un profil féminin drapé d'une robe. On raconte qu'un seigneur amoureux d'une bergère voulut un jour l'épouser et que la future épousée se retrouva pétrifiée pour s'être constitué une dot en dépouillant sa mère de tous ses biens.
Couvent Saint-François, clocher de l'église.
Gros plan sur la figure de Marie couronnant le clocher de l'église.
Intérieur de l'église du couvent Saint-François, avec ses chapelles latérales.
Fresque en médaillon visible au plafond de la nef. La représentation de la Vierge Marie entourée d'anges est dite "Assomption de Marie" quand la Vierge a, comme ici, les yeux tournés vers le ciel.
Dans un bras du transept, autre représentation de la Vierge Marie entourée d'anges. Marie a cette fois les yeux tournés vers la terre. Ainsi représentée, elle est dite "Immaculée Conception".
Statue de saint François d'Assise portant les stigmates de la croix (milieu XIXe siècle). Fondateur de l'ordre des Franciscains, qui prêchent la pauvreté et l'humilité, saint François d'Assise naît en Ombrie à la fin du XIIe siècle dans une riche famille. Après une jeunesse dissipée, il reçoit la révélation et rompt tout lien familial pour se consacrer à la Parole de Dieu. Il se retire du monde, vit en ermite, reçoit en 1224 les stigmates de la Passion (mains et pieds) et meurt 2 ans plus tard, le 3 octobre 1226.
Statue de Sainte Lucie. Morte en martyre sous Dioclétien, la jeune sainte aurait eu les yeux arrachés par son bourreau ou, selon une version pas plus réjouissante, se les serait arrachés elle-même pour décourager tout prétendant car elle avait fait vœu de chasteté. Particulièrement vénérée en Corse, Sainte Lucie est présente dans de très nombreuses églises de l'île. Elle y figure portant ses yeux sur un plateau.
L'église Saint-François abrite une pièce exceptionnelle, ce grand Christ en croix (école italienne, XVIe siècle, classé MH en 1960). Baptisé "U Santu Franciscone", il mesure 1,85 m de haut. C'est le plus ancien Christ en bois polychrome de Corse.
Saisissant de réalisme...
Entrée du couvent Saint-François. Le couvent a été fondé en 1481 par le seigneur Giovan Paolo di Leca, l'un des derniers seigneurs en lutte contre la république de Gênes. D'abord habité par les franciscains, reconstruit au XVIIe siècle puis abandonné pendant la Révolution, il est finalement racheté par Mgr Casanelli d'Istria qui en fait don aux Missionnaires Oblats de Marie Immaculée.
Une aile du couvent. L'ombre d'un grand tilleul, un cadran solaire sur la façade. Des bâtiments sans ostentation, l'humilité telle que la prêchait Saint François. Lieu propice au recueillement, le couvent accueille toute l'année des visiteurs en retraite spirituelle. Méditer sur la finalité des choses...
Dans le jardinet à l'entrée du couvent, petite statue de Saint François en robe de bure. Auteur du "Cantique des Créatures", Saint François d'Assise concevait un amour profond pour les animaux, car issus du même Créateur, auxquels il s'adressait en prière en les appelant "frères" et "sœurs". Surnommé "le Saint des oiseaux" il est souvent représenté en tableau entouré d'oiseaux (fresques de Giotto, à Assise) ou en statue dans de nombreuses églises.
(Photos prises le 10 mai 2022)
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