• Mornac-sur-Seudre.                                                                                                                                                            2. Le port et les cabanes ostréicoles.

     

    Ma balade à la découverte de Mornac-sur-Seudre se poursuit par l'endroit le plus représentatif  de l'activité du village : son port. Bâti sur l'estuaire de la Seudre, soit la portion du fleuve soumise aux effets de la marée océanique, Mornac vit depuis toujours au rythme de l'eau salée qui remonte à travers les terres et les irrigue à marée haute. Le plan d'occupation des sols est d'ailleurs éloquent puisque les zones humides constituent près de 60 % de la commune (contre moins de 4 % de territoire urbanisé et 36 % de terres agricoles). Une situation géographique favorable dont Mornac a su tirer profit dès le Moyen-Age par l'exploitation en salines des marais qui l'entourent et structurent depuis son paysage.

     

    De fait, à peine sorti du village, on se retrouve au coeur d'une immense zone marécageuse quadrillée de chenaux labyrinthiques et d'une mosaïque de bassins. Après des siècles de culture du sel, ces bassins ont été peu à peu transformés en claires pour l'affinage des huîtres de "Marennes-Oléron" (aire géographique de 3000 hectares et 27 communes, dont Mornac), l'activité ostréicole représentant désormais, avec le tourisme, l'essentiel de son économie.

     

    Établi en rive gauche de l'estuaire de la Seudre, le petit port aux maisons colorées est animé. Et pas seulement par les touristes. Car sous ses airs de carte postale, c'est un port très actif, où pêcheurs et ostréiculteurs travaillent au quotidien.  

      

    Autour de Mornac, un environnement de marais à perte de vue. Visible au loin, le village, dominé par la tour carrée de l'église Saint-Pierre. Milieu spécifique, fait de prairies saumâtres, les marais de la Seudre sont classés zone Natura 2000.

     Mornac-sur-Seudre, les marais, le port et les cabanes ostréicoles

     

    Marais salants reconvertis en bassins ostréicoles. Appelées "claires", c'est dans ces bassins que sont affinées pendant plusieurs semaines les huîtres de Marennes-Oléron. Haut de gamme de l'appellation : la fine de claire verte, facilement reconnaissable à le teinte verdâtre de ses branchies. Cette couleur caractéristique, entièrement naturelle, est obtenue par la présence dans les claires d'une algue appelée navicule... bleue. Algue phytoplanctonique filtrée par l'huître, la navicule bleue sécrète un pigment... vert, qui vient se fixer sur les branchies quand l'huître est immergée.

    Mornac-sur-Seudre, le port et les cabanes ostréicoles

      

    Imbrication intime entre la terre et l'eau. La lumière sur les marais de la Seudre est changeante, pouvant passer en quelques minutes par des reflets tantôt gris, tantôt bleus ou verts selon l'ensoleillement.  

    Mornac-sur-Seudre, le port et les cabanes ostréicoles

     

    Les marais sont parcourus de chemins pédestres. Se promener à travers le labyrinthe de chenaux et de bassins ostréicoles est un excellent moyen pour appréhender ce milieu si particulier, entre eaux salées de l'Atlantique et eaux douces de la Seudre.

    Mornac-sur-Seudre, les marais, le port et les cabanes ostréicoles

      

    Construit en 2006 au bord du chenal de Mornac, ce phare porte-feu est une réplique de ceux utilisés au Moyen-Age. Une fois le foyer allumé, un mécanisme à bascule permettait de hisser la cage afin que le feu soit visible de loin pour guider les marins à l'approche des côtes.

    Mornac-sur-Seudre, les marais, le port et les cabanes ostréicoles

       

    Le port de Mornac et son alignement de cabanes ostréicoles. La route longe le chenal sur environ 1 km et conduit en cul-de-sac jusqu'à la confluence avec la Seudre. 

    Mornac-sur-Seudre, les marais, le port et les cabanes ostréicoles

      

    Les maisonnettes en bois du port de Mornac sont toutes traversantes, c'est-à-dire qu'elles ont toutes une double ouverture : d'un côté, ouvertes sur la route ; de l'autre, ouvertes côté ponton, pour un accès direct au chenal. 

    Mornac-sur-Seudre, les marais, le port et les cabanes ostréicoles

     

    3 photos suivantes. Sommaires, quelques petites touches déco : les cabanes colorées alignées le long du chenal. Autrefois cabanes de pêcheurs ou d'ostréiculteurs, elles font aujourd'hui l'objet de concessions à louer et sont surtout utilisées pour le loisir et la plaisance.

    Mornac-sur-Seudre, les marais, le port et les cabanes ostréicoles

     

    Mornac-sur-Seudre, le port et les cabanes ostréicoles

        

    Mornac-sur-Seudre, les marais, le port et les cabanes ostréicoles

     

    Les cabanes disposent chacune de leur ponton pour l'accostage des bateaux. Le village vit au rythme des marées. J'ai eu la chance de visiter Mornac à marée haute, où le paysage est quand même plus photogénique. A marée basse, la terre est gorgée d'eau, vaseuse, c'est un peu la bouillasse, avec juste un petit ru coulant au fond du chenal.

    Mornac-sur-Seudre, les marais, le port et les cabanes ostréicoles

     

    Visible au printemps/été 2022 sur les murs des cabanes ostréicoles et baptisée "Mornaçons d'hier et d'aujourd'hui", une expo photos (photos issues des propres collections des habitants) retraçait en une vingtaine de panneaux l'histoire du chenal et du port ainsi que la vie des pêcheurs, paludiers et ostréiculteurs locaux. 

    Mornac-sur-Seudre, le port et les cabanes ostréicoles

     

    Sur la photo, au pied de la cabane, coupelles de captage. Le cycle d'élevage des huîtres comprend plusieurs étapes allant du développement larvaire en passant par le captage et l'élevage proprement dit jusqu'à à l'affinage en claires. 48 H après l'éclosion, les larves sont capables de nager. Microscopiques, elles vont grossir et chercher à se fixer à un support. Pour ce faire, les ostréiculteurs posent dans l'eau leur matériel de captage, comme ces coupelles enfilées en cordées, ou des pieux, sur lesquels viendront se fixer les petites huîtres (le naissain). 

    Mornac-sur-Seudre, le port et les cabanes ostréicoles

     

    Les cabanes ostréicoles, côté ponton. Le port de Mornac est un port actif, de nombreux bateaux circulent sur le chenal menant à la Seudre. Si désormais la presque totalité des bassins de l'estuaire sert à la production d'huîtres, jusqu'au XIXe siècle, le sel, ingrédient indispensable à la conservation du poisson, représentait l'essentiel de l'économie locale. Il était transporté par wagons à travers les marais. Témoin de cette époque, la ligne de chemin de fer qui traverse le village ne sert plus aujourd'hui qu'à la circulation du "Train des Mouettes", un train touristique exploité par l'association CFTS (Chemin de Fer Touristique de la Seudre). Depuis quelques années, une nouvelle production est apparue dans le bassin de Marennes-Oléron : la pénéiculture (élevage de crevettes impériales).

    Mornac-sur-Seudre, les marais, le port et les cabanes ostréicoles

      

    Passées les cabanes ostréicoles, le chenal de Mornac poursuit son cours en amont jusqu'à la confluence avec la Seudre. Leurs eaux mêlées sur 68 km se jettent dans l'Atlantique, face à l'île d'Oléron. 

    Mornac-sur-Seudre, les marais, le port et les cabanes ostréicoles

     (Photos prises le 11 juin 2022)


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  • Mornac-sur-Seudre.                                                                                                                                                            1. Rues du village et église Saint-Pierre.

     

    Entouré à perte de vue par les marais de la Seudre, fleuve de Charente-Maritime auquel le village doit son nom complet et qui a façonné son identité palustre depuis le Moyen-Age, Mornac s'organise autour de son port mais aussi de son église vers laquelle convergent les rues du centre-bourg. Moins de 4 % de son étendue est urbanisée contre presque 60 % en zone humide. Au vu de cette prééminence du milieu marécageux, on appréhende mieux son histoire et son patrimoine. 

     

    Situé en Charente-Maritime, à 12 km de Royan et à une quinzaine de km de Talmont-sur-Gironde, Mornac compte environ 850 habitants. Classé parmi les "Plus Beaux Villages de France", l'endroit ne manque pas d'attrait.  Un parking arboré à l'entrée du village, on gare la voiture, le reste se fait à pied. Et la promenade est fort agréable. En ce 11 juin, cela sentait déjà un peu l'été. L'air était doux, l'après-midi lumineuse. Chauffées par les rayons du soleil, les façades blanches des maisons charentaises semblaient encore plus éclatantes. J'ai aimé flâner au hasard à travers le lacis de ruelles fleuries et les échoppes d'artisans, observer ici un profil sur un mur, là une terrasse en plein ciel, passer sous la belle charpente de la halle moyenâgeuse. Avec son clocher fortifié, l'église Saint-Pierre, de style roman, mérite la visite, notamment pour son abside en cul-de-four où subsistent des traces de fresques du XIIe siècle. 

     

    En sortant de l'église, la rue descend vers le charmant petit port de Mornac et ses cabanes colorées alignées le long du chenal menant à la Seudre. Le paysage est typique du bassin de Marennes-Oléron : une mosaïque de bassins ostréicoles, reliés entre eux par un labyrinthe de chenaux. Ce sera l'objet de l'article suivant...

     

    Mornac-sur-Seudre : la rue du Port, dominée par le puissant clocher de l'église Saint-Pierre. Presque un donjon. La flèche qui coiffait autrefois le clocher a disparu en 1943, détruite par un incendie. 

    Mornac-sur-Seudre, rues du village et église Saint-Pierre

     

    En continuant plus avant dans la rue, la forme de l'église Saint-Pierre se dévoile (le recul manque malheureusement pour la photographier en entier). A gauche, petite sculpture murale sur la maison aux volets bleu canard. 

    Mornac-sur-Seudre, rues du village et église Saint-Pierre

      

    Rue du Port, grille verte sous un arceau de jasmin. Joli le n°17 !!

    Mornac-sur-Seudre, rues du village et église Saint-Pierre

     

    Devant la halle moyenâgeuse, conversation sous le tilleul.

    Mornac-sur-Seudre, rues du village et église Saint-Pierre

     

    Hortensias, lauriers, rosiers grimpants... Beaucoup de fleurs, partout, dans les rues du village.

    Mornac-sur-Seudre, rues du village et église Saint-Pierre

     

    Au hasard de ma flânerie, une arche entre 2 maisons.

    Mornac-sur-Seudre, rues du village et église Saint-Pierre

     

    Et une terrasse en plein ciel... Un peu plus près des étoiles lors des nuits d'été.

    Mornac-sur-Seudre, rues du village et église Saint-Pierre

      

    Bâtie sur l'emplacement d'un ancien sanctuaire mérovingien (d'où les sarcophages exposés, mis au jour lors de fouilles entreprises au XXe siècle), l'église Saint-Pierre côté abside flanquée de 2 absidioles, avec son plan bien visible en croix latine. 

    Mornac-sur-Seudre, rues du village et église Saint-Pierre

     

    Le haut de l'abside : arcatures romanes et corniche à modillons.

    Mornac-sur-Seudre, rues du village et église Saint-Pierre

     

    Intérieur de l'église Saint-Pierre, belle nef charpentée. Visible dans le fond, l'abside romane en cul-de-four, précédée d'un arc gothique.

    Mornac-sur-Seudre, rues du village et église Saint-Pierre

     

    Fresques de l'abside : armoiries des seigneurs de Mornac et, antérieur, le Christ en majesté, presque totalement effacé.

    Mornac-sur-Seudre, rues du village et église Saint-Pierre

     

    Dans une niche, statue de Saint-Pierre tenant la clef du paradis.

    Mornac-sur-Seudre, rues du village et église Saint-Pierre

     

    Chapelle de la Vierge Marie.

    Mornac-sur-Seudre, rues du village et église Saint-Pierre

     

    Les murs de la chapelle sont couverts du monogramme "A.M." (pour Ave Maria). Représentée mains jointes, Marie, visage empreint de douceur, le regard tourné vers le ciel.

    Mornac-sur-Seudre, rues du village et église Saint-Pierre

     (Photos prises le 11 juin 2022)


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  • Notre-Dame de Royan, née des décombres.

     

    J'ai découvert l'existence de Notre-Dame de Royan en prospectant sur Internet à la recherche d'idées de visites pour mon séjour en Charente-Maritime. 4 jours de mini-vacances dans ce département dont je savais déjà qu'ils passeraient trop vite... Il s'agissait de bien remplir, sans surcharger. Je l'ai donc ajoutée un peu en dernière minute à la liste quasi bouclée des choses à faire... et j'ai été bien inspirée. Avancer rue Notre-Dame et découvrir au bout de la rue son impressionnante silhouette de béton armé dont le clocher pointe à 60 m vers le ciel relève du choc visuel. Le second choc se produit à l'intérieur. En pénétrant dans l'église, la sensation de verticalité saisit. La hauteur de la nef aussi. Monumentale, portée par une ossature de piliers en béton qui la dégage de tout soutènement, son architecture d'un seul tenant libère un volume exceptionnel, étonnamment baigné de lumière dans tout ce gris. Une lumière blanche, que l'on dirait céleste. 

     

    Née des décombres, l'édification de Notre-Dame de Royan fit partie du vaste plan de reconstruction mené à partir des années 1950 dans une ville détruite à 80 % par le déluge de feu s'étant abattu sur son sol en janvier puis avril 1945. Et là, je pensais connaître l'histoire du bombardement de la ville au cours de la Seconde Guerre mondiale, mais j'avais tout faux. Car ce ne sont pas les Allemands (comme je le pensais) qui ont bombardé Royan mais les Alliés. Une action menée au cours de la phase de Libération du pays pour venir à bout d'une poche ennemie. 

     

    Le centre-ville de Royan devient dès lors un immense chantier. Choisi par le maire de l'époque, l'architecte Guillaume Gillet a pour mission de rebâtir une église la plus haute possible, église symbole d'une ville non plus couchée mais debout, d'une ville qui se relève de ses plaies. Après 3 années de travaux, Notre-Dame de Royan est bénie le 10 juillet 1958. 

      

    L'église de Royan (MH depuis 1988) fit partie des bâtiments détruits par le bombardement allié de 1945. Plutôt que de la rebâtir à l'identique, le choix s'est porté sur la construction d'une nouvelle église à l'architecture futuriste, en béton brut, conforme aux canons de l'époque. Le chœur épouse la forme d'une proue de navire. Le clocher, visible depuis l'océan, culmine à 60 m.

    L'église Notre-Dame de Royan

     

    Une nef de 35 m de haut, verticalité saisissante !! Œuvre de l'architecte Guillaume Gillet et des ingénieurs Bernard Lafaille et René Sarger, l'église Notre-Dame de Royan s'intègre dans le renouveau de l'architecture religieuse lié à la reconstruction d'après-guerre. A l'intérieur comme à l'extérieur, le béton domine.

    Notre-Dame de Royan, un choc visuel et esthétique

     

    La particularité de l'église Notre-Dame de Royan réside dans sa structure : une ossature composée de 24 piliers en béton armé en forme de V. Conçus par l'ingénieur Bernard Lafaille dont ils sont la spécialité (les fameux V Lafaille), mais d'une hauteur et d'une envergure ici jamais atteintes, ces piliers, en dégageant la nef de tout soutènement, libèrent un vaste espace intérieur (capacité de 2000 fidèles) baigné de lumière par l'alternance de grandes verrières verticales non figuratives. La plupart des vitraux de l'église Notre-Dame ont été réalisés par le maître verrier Henri Martin-Granel (1914-2008).

    Notre-Dame de Royan, un choc visuel et esthétique

     

    Derrière le maître-autel, le vitrail de la Vierge illumine l'espace de ses couleurs vives. Il s'emboîte parfaitement dans le grand V Lafaille du chœur. Œuvre du maître verrier Claude Idoux (1915-1990), réalisé en cristal de Baccarat, il représente la Vierge en Assomption.

    Notre-Dame de Royan, un choc visuel et esthétique

      

    L'orgue placé en tribune est l'œuvre du facteur Robert Boisseau. Inauguré en 1964, c'est le plus grand de Charente-Maritime : 47 jeux, 3 claviers et 3 600 tuyaux en étain martelé (MH depuis 2006).

    Notre-Dame de Royan, un choc visuel et esthétique

       

    Notre-Dame de Royan abrite une statuaire de qualité, de belles œuvres exposées dans la nef, le déambulatoire et la tribune qui témoignent du renouveau de l'art sacré dans les décennies d'après-guerre. Ci-dessous, "La Vierge" (1965-1966, Jean-Pierre Roux).

    Notre-Dame de Royan, un choc visuel et esthétique

     

     Les fonts baptismaux.

    Notre-Dame de Royan, un choc visuel et esthétique

     

    Bénitier métallique surmonté d'une croix (1958, Guillaume Gillet).

    Notre-Dame de Royan, un choc visuel et esthétique

     

    "La Descente de croix" (vers 1960, Jacques-Yves Perret)

    Notre-Dame de Royan, un choc visuel et esthétique

     

     "Sainte Jeanne d'Arc" (1968, Jacques-Yves Perret).

    Notre-Dame de Royan, un choc visuel et esthétique

      

    "L'Immaculée Conception, ou Vierge noire" (1958, Gaston Watkin).

    Notre-Dame de Royan, un choc visuel et esthétique

      

    A 3 m au-dessus du sol, la galerie qui ceinture l'édifice est illuminée de vitraux en forme de losanges. Ces vitraux, figuratifs, reprennent le thème du Chemin de Croix, tout en s'éloignant toutefois de sa représentation traditionnelle à 14 stations fixée au XVIe siècle. Ici, il est composé de 18 panneaux. Ci-dessous : Marie reçoit le corps de son fils, 15e panneau. 

    Notre-Dame de Royan, un choc visuel et esthétique

     

    Symbole de Résurrection : la Croix, lumière sur le monde, 16e panneau. 

    Notre-Dame de Royan, un choc visuel et esthétique

     (Photos prises le 11 juin 2022)


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  • Talmont-sur-Gironde, l'église Sainte-Radegonde.

     

    A l'extrémité de l'avancée de terre sur laquelle est construit le village de Talmont, l'église Sainte-Radegonde domine l'estuaire de la Gironde dans sa partie la plus large. Trapue, comme ramassée sur elle-même sur sa petite terrasse au-dessus des remparts, elle présente un aspect roman caractéristique dont le portail de la façade nord, avec sa triple rangée de voussures sculptées, constitue l'expression la plus pure.

     

    Datée du XIIe siècle, épargnée par la Guerre de Cent Ans, les Guerres de Religion, la Fronde ou encore la Révolution Française, si elle n'a pas souffert des aléas belliqueux de l'histoire, c'est d'un tout autre ennemi dont elle subit les assauts depuis des siècles, un ennemi patient, opiniâtre, qui la ronge sourdement et menace son intégrité : l'érosion. Car posée sur la falaise, en aplomb de l'estuaire, la belle Saintongeaise est fragile sur son piédestal de calcaire. Ses murs, la falaise qui la soutient, les remparts qui la ceinturent, tous sont lentement grignotés sous l'action abrasive du vent et des embruns. Des effets bien visibles quand on fait le tour de l'édifice. Plusieurs campagnes de restauration ont été menées, mais sous les remparts, la mer érode toujours et continuellement la roche. La situation est sérieuse. Un décret du 30 avril 2022 plaçait le village de Talmont sur la liste des 126 communes prioritaires face à l'érosion côtière. 

     

    Joyau en péril, l'église est placée sous le patronat de Sainte-Radegonde. Sûr que cette très pieuse princesse germanique, devenue reine des Francs par son mariage avec Clotaire Ier,  fils  aîné de Clovis, intercède de là-haut pour aider à la sauver... 

       

    Chemin des Remparts, menant à l'église Sainte-Radegonde depuis le village.

    Talmont-sur-Gironde, l'église Sainte-Radegonde

     

    Postée en vigie sur les remparts, Sainte-Radegonde (MH depuis 1890) domine l'estuaire de la Gironde. Voici la façade qu'elle présente en venant du village. Une façade tout en sobriété, au portail simplement orné d'une accolade gothique. Cette partie de l'église, côté ouest, a été reconstruite au XVe siècle après l'effondrement d'une travée de la nef, fragilisée par le creusement de la crypte quelques mètres en-dessous.

    Talmont-sur-Gironde, l'église Sainte-Radegonde

     

    Opposée à la sobriété de la façade ouest, la façade nord de l'église Sainte-Radegonde est la plus spectaculaire. De pur style roman, ouverte sur le cimetière attenant, elle arbore un superbe portail à voussures flanqué de 2 arcades aveugles. Une série de 7 petites arcades à colonnettes décore le deuxième niveau tandis que la partie supérieure est ornée d'un oculus. C'est du fond du petit cimetière que l'on a la plus belle vue d'ensemble sur ce côté de l'église.

    Talmont-sur-Gironde, l'église Sainte-Radegonde

      

    Le décor sculpté sur les voussures du portail et des arcades latérales est très érodé, au point d'être par endroits difficile à interpréter. Sur le rouleau inférieur, on distingue au centre, l'Agneau, symbole du Christ, entouré d'anges ; sur le rouleau du milieu, des hommes forment une pyramide humaine, symbole de la communauté chrétienne ; de chaque coté du rouleau supérieur, d'autres hommes tirent un animal avec une corde. Roche tendre, le calcaire est facile à sculpter. Il est en contrepartie fortement soumis à l'érosion. Sainte-Radegonde a connu plusieurs campagnes de restauration. En faisant le tour du monument, on distingue nettement les parties authentiques des parties refaites.

    Talmont-sur-Gironde, l'église Sainte-Radegonde

     

    L'arcade latérale gauche représente l'enfer. 2 dragons amphicéphales, gueule ouverte et crocs acérés, se font face.  

    Talmont-sur-Gironde, l'église Sainte-Radegonde

      

    L'arcade latérale droite représente le paradis. Mais les sculptures de la voussure et de la frise sont trop érodées pour être lisibles. 

    Talmont-sur-Gironde, l'église Sainte-Radegonde

     

    Détails des voussures et chapiteaux sculptés du portail nord (3 photos suivantes).

    Talmont-sur-Gironde, l'église Sainte-Radegonde

     

    Talmont-sur-Gironde, l'église Sainte-Radegonde

     

    Talmont-sur-Gironde, l'église Sainte-Radegonde

      

    Les murs de l'église, rongés par l'air marin à forte salinité.

    Talmont-sur-Gironde, l'église Sainte-Radegonde

     

    Située à l'est, l'abside est divisée verticalement en 5 parties séparées les unes des autres par des contreforts-colonnes, chacune des 5 parties étant elle-même divisée en 3 bandeaux. Le niveau intermédiaire fait alterner des baies et des arcades aveugles. Au niveau supérieur, l'arcature est couronnée d'une corniche à modillons représentant des têtes humaines, animales ou des monstres. Cette superposition d'arcades est fréquente dans les églises romanes de Saintonge. L'abside et son décor à modillons ont été en grande partie reconstruits.

    Talmont-sur-Gironde, l'église Sainte-Radegonde

     

    Quelques modillons de l'abside et de la façade sud (3 photos suivantes).

    Talmont-sur-Gironde, l'église Sainte-Radegonde

     

    Talmont-sur-Gironde, l'église Sainte-Radegonde

     

    Talmont-sur-Gironde, l'église Sainte-Radegonde

      

    A l'intérieur, statue de Sainte-Radegonde, à laquelle est dédiée l'église. Reine des Francs et fondatrice de l'abbaye Sainte-Croix de Poitiers, Sainte Radegonde vécut au VIe siècle.

    Talmont-sur-Gironde, l'église Sainte-Radegonde

     

    Portail nord de l'église, grand ouvert sur le cimetière attenant.

    Talmont-sur-Gironde, l'église Sainte-Radegonde

     

    Dans le petit cimetière jouxtant l'église, croix et roses trémières montent vers le ciel dans un même élan.                                                        Classé Monument Historique en 1934, jusqu'au milieu du XXe siècle, le cimetière de Talmont était divisé en 2 enclos séparés, l'un pour les catholiques, l'autre pour les protestants.

    Talmont-sur-Gironde, l'église Sainte-Radegonde

     

    Sainte-Radegonde fut maintes fois remaniée au cours de l'histoire. Fortifiée au XIIIe siècle lors du rachat de Talmont par le duc d'Aquitaine et roi d'Angleterre Edouard Ier, le toit fut alors transformé en plateforme à créneaux qui faisait office de chemin de ronde. Au XXe siècle, André Malraux, ministre des Affaires Culturelles, engagea une campagne de restauration pour sauver l'édifice de l'effondrement. Des travaux de consolidation polémiques qui modifièrent profondément l'apparence de l'église (suppression de la plateforme crénelée et ajout de la grosse tour carrée).

    Talmont-sur-Gironde, l'église Sainte-Radegonde

     

    Derrière l'église, le chemin des Remparts se poursuit et mène jusqu'à la falaise du Caillaud, de l'autre côté de l'estuaire.

    Talmont-sur-Gironde, l'église Sainte-Radegonde

     (Photos prises le 11 juin 2022)


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