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Abbaye de Fontevraud (2). Le cloître
Abbaye de Fontevraud. 2. Le cloître, les abbesses... et les petites hirondelles.
Située en terre angevine, à une 15aine de km de Saumur, l'abbaye de Fontevraud se trouve sur le parcours des 280 km du Val-de-Loire inscrits depuis l'année 2000 au patrimoine mondial de l'Unesco (portion entre Sully-sur-Loire et Chalonnes).
Fondée par l'ermite prédicateur Robert d'Arbrissel en 1101, l'abbaye de Fontevraud deviendra au fil du temps et des agrandissements successifs une véritable cité monastique, comprenant en tout 4 monastères, soit l'un des complexes religieux parmi les plus vastes et les plus puissants de l'Europe médiévale. Son nom reste à jamais associé à celui d'Aliénor d'Aquitaine, et à travers elle aux couronnes de France et d'Angleterre. Abbaye royale, donc, s'écrivent en filigrane les noms de personnalités issues de lignages prestigieux (Capétiens, Valois, Bourbons, Plantagenêt) au nombre desquelles Louis VII, Saint-Louis, Louis XII, François Ier, Louis XIV, la marquise de Montespan, Louis XV, Henri II d'Angleterre et Richard Cœur de Lion.
Par son rayonnement religieux, par sa puissance financière, par les personnalités historiques de sang royal liées à ses presque mille ans d'histoire et par son mode de fonctionnement pour le moins novateur, l'abbaye de Fontevraud se distingue à plus d'un titre. C'est ce qui rend la visite particulièrement intéressante et foisonnante. Autant dire que pour qui veut approfondir un peu, il y a matière !! Difficile de tout faire, de tout voir. Personnellement, j'ai surtout passé du temps dans 4 lieux de cet impressionnant ensemble conventuel. Mon choix s'est porté sur les cuisines romanes, le cloître, la salle du chapitre et l'église abbatiale.
Après un article consacré aux cuisines romanes, voici le cloître et ses longues allées de silence. Enfin de silence... presque... à quelques trissements et gazouillis près.
Galeries nord et est du cloître. Long de 59 m, le cloître dessert les grands lieux de la vie monastique dont l'abbatiale, la salle capitulaire, le réfectoire et les dortoirs.
Angle des galeries nord et est du cloître, surmontées du clocher de l'église abbatiale.
Gros plan sur le clocher de l'église abbatiale. Sans cloche, muet, il n'a plus sonné depuis la Révolution Française. Afin de lui redonner vie, l'abbaye de Fontevraud a passé commande d'un ensemble de 6 cloches à la fonderie Cornille-Harvard de Villedieu-les-Poêles, dans la Manche, avec pour mission de fondre de 2019 à 2025 une nouvelle cloche chaque année et ainsi permettre de recréer la sonnerie historique du clocher (2e plus importante commande artistique à ce jour après Notre-Dame de Paris). Chaque cloche, au décor personnalisé, est baptisée du nom d'une abbesse ou d'un personnage historique en rapport avec l'abbaye. Ont déjà été fondues "Aliénor", "Richard", "Pétronille" et "Gabrielle".
En arrière-plan, galerie sud du cloître, desservant l'immense salle du réfectoire (46 m de long).
Galerie est, desservant la salle du chapitre et les dortoirs.
L'abbaye de Fontevraud se singularisait par un mode de fonctionnement plutôt novateur pour l'époque : la cohabitation hommes/femmes. Jusqu'à 60 moines et plus de 200 moniales y ont cohabité, formant une communauté mixte répartie sur un même lieu en 4 monastères distincts. Hommes et femmes ne se fréquentaient cependant que lors des différents offices qui rythmaient la journée. De plus, fait sans précédent, la direction générale de l'abbaye était confiée à une femme. Ainsi, de Pétronille de Chemillé en 1115 à Julie d'Antin jusqu'en 1792 à la Révolution Française, 36 abbesses se succèderont à Fontevraud... dont près de la moitié de sang royal. Des familles généreuses en offrandes et donations, asseyant par là-même la puissance financière de l'abbaye. On voit bien le lien étroit qui unissait pouvoir royal et religieux à Fontevraud, où les abbesses étaient opportunément "placées" (la galerie est accueille une exposition consacrée à 11 d'entre elles, le lien est éloquent).
Ci-dessous, galerie est, portrait de Marie-Madeleine Gabrielle de Rochechouart de Mortemart, 34e abbesse de Fontevraud (1670 à 1704 -la cloche créée en 2023 porte son nom). Nommée en 1670 à 25 ans par Louis XIV, Marie-Madeleine est la soeur d'Athénaïs, marquise de Montespan, qui n'était autre que... la favorite de Louis XIV !!
Ci-dessous, galerie est, portrait de Julie-Sophie-Gillette de Pardaillan de Gondrin de Montespan d'Antin. Arrière-arrière-petite-fille de Madame de Montespan, elle fut la 36e et dernière abbesse de Fontevraud (1765 à 1792). A la Révolution Française, les ordres monastiques seront supprimés et les religieuses expulsées de l'abbaye.
Quelques exemples de clefs de voûte du cloître (restauration au XXe siècle par l'architecte Lucien Magne, disciple de Viollet-le-Duc).
Le cloître, galerie ouest, longue allée de silence.
De silence... finalement pas tant que ça. Car avant de les voir, je les ai entendues. Des petits cris perçants, insistants, qui font lever la tête. Et à bien y regarder, chaque clef de voûte est occupée par des espèces de boules foncées... autant de nids d'hirondelles où les oisillons, affamés, réclament la becquée.
Faits de boue séchée, de paille, de radicelles, de brins d'herbes et brindilles agglomérés, les nids, fermés, accueillent plusieurs oisillons dont on aperçoit par l'orifice tantôt un bout de tête, tantôt un bout de queue.
Gazouillis et sifflements... Les parents apportent aux oisillons les insectes capturés en vol. D'incessants allers-retours pour nourrir la nichée affamée. Après un mois cachés, les petits prendront leur envol...
Pas évident d'appuyer sur le déclencheur au bon moment. Mais le spectacle était charmant.
(Photos prises le 21 août 2022)
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Tags : Pays-de-la-Loire, Maine-et-Loire, Fontevraud, abbaye, patrimoine de l'Unesco
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Commentaires
1JeffMardi 25 Avril 2023 à 20:20Répondre
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